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    L'horlogerie et la mécanique de l’allégorie chez Jean Froissart 1

    Julie Singer

    Résumé

    L'Orloge amoureus de Jean Froissart, un poème narratif rédigé vers 1368, se construit à partir d'une comparaison simple : l'amant est comme une horloge, ou plus précisément, l'amant peut bien être comparé à l'horloge. Dans cet article nous proposons de résumer les innovations de l'horlogerie au xive siècle et de situer le poème de Froissart dans le contexte d'autres ouvrages contemporains traitant de l'horloge ou de l'horlogerie. L'élaboration de l'Orloge amoureus en trois « modes » de narration lui donne à la fois le caractère d'un traité de l'horlogerie, d'une description allégorique de la psychologie de l'amant, et d'un appel direct à la dame aimée. Alors que la composition du texte à partir d'un modèle mécanique met en relief les concepts fondamentaux de l'ordre et de la mesure, l'instabilité inhérente au rapport entre les trois modes expose et déconstruit le travail que fait le créateur d'une allégorie amoureuse.

    Abstract

    Clockmaking and the Mechanics of Allegory in Jean Froissart's Orloge amoureus. Jean Froissart's Orloge amoureus, a narrative poem composed around 1368, is constructed upon a seemingly simple analogy : the lover is like a clock, or more precisely, a lover could well be compared to a clock. The present study proposes to summarize the innovations of fourteenth-century clockmaking and to situate Froissart's poem within the context of other late medieval texts employing the figure of the clock. The text's elaboration in three narrative « modes » make of it at once a treatise on clockmaking, an allegory of the psychology of love, and a direct appeal to the beloved lady. While the text's dependence on a mechanical model underlines the concepts of order and measure, the inherent instability of the relationship between the three modes lays bare and deconstructs the mechanisms of conventional love-allegory.

    Texte Intégral

    L'Orloge amoureus de Jean Froissart, un poème narratif rédigé vers 1368, consiste en une description allégorique de la psychologie de l'amant, construite à partir d'une comparaison : l'amant est comme une horloge. Cet emploi de l'horloge comme point de départ d'une allégorie amoureuse a été durement critiqué par Johan Huizinga dans L'Automne du Moyen Âge. « Le symbolisme était usé, » dit-il. « La recherche de symboles et d'allégories était devenue un vain jeu d'esprit, une fantaisie superficielle sur une seule analogie... dès que la manie du symbolisme s'applique aux matières profanes ou simplement morales, la décadence apparaît » 2. Le premier exemple qu'il fournit de cette « décadence » est, bien sûr, l'Orloge amoureus. Mais loin d'être un texte que nous pouvons rejeter comme « décadent », le poème de Froissart a le mérite de témoigner d'une étape importante dans l'histoire de l'horlogerie, d'engager une réflexion sur l'importance du nombre et de la mesure dans la poésie et dans le comportement humain et de nous divertir. Je propose donc de lire le texte en prêtant une attention particulière aux enjeux mathématiques, technologiques et allégoriques implicites dans l'usage de la figure de l'horloge. Après un résumé de l'histoire de l'horlogerie au xive siècle, il conviendra de situer l'Orloge amoureus dans le contexte d'autres ouvrages contemporains traitant de l'horloge ou de l'horlogerie.

    L'horlogerie au xive siècle

    L'horloge mécanique telle que Froissart la décrit est une innovation technique du xive siècle, dont l'un des exemples les plus connus aujourd'hui est l'horloge sonnante que Charles V fit installer au palais royal sur l'Île de la Cité. Cette horloge, construite par l'horloger allemand Henri de Vic entre 1362 et 1370, eut un tel succès que le roi fit installer d'autres horloges au Château de Vincennes et à l'Hôtel Saint-Pol. Jean Golein écrit dans sa traduction du Rationale divinorum officiorum que le roi ordonna aux églises de Paris de faire sonner leurs cloches en même temps que son horloge pour que tous les Parisiens sachent l'heure : « Car luise le soleil ou non l'on scet touz jours les heures sanz defaillir par ycelles cloches bien attrampes » 3. Les historiens ont tendance à interpréter ce décret comme un moment charnière dans le passage du temps liturgique, caractérisé par l'inégalité des heures, au temps moderne, qui divise le jour en vingt-quatre heures égales. Jacques Le Goff distingue entre ce qu'il appelle le « temps de l'église » et le « temps du marchand » 4 : l'émergence de l'heure fixe aurait convenu à la bourgeoisie et changé la manière dont les ouvriers étaient payés. Le décret de Charles V, qui avait pour but de régulariser le passage des heures à Paris, serait donc un événement d'une importance capitale dans l'histoire économique et culturelle de la France. Cependant, comme la remarque de Jean Golein est la seule référence contemporaine au décret connue des chercheurs modernes, Gerard Dohrn-Van Rossum met en doute l'idée que Charles V ait jamais fait une telle loi 5. Même dans sa discussion des habitudes quotidiennes de « nostre roy bien ordenné » 6, dans lequel elle raconte l'histoire du roi Elfredes d'Angleterre et de sa chandelle divisée en vingt-quatre parties, Christine de Pizan ne mentionne jamais l'horloge du palais.

    En tout cas, quelle que soit sa signification dans l'histoire du travail, l'importance de l'horloge du palais royal dans l'œuvre de Froissart est claire : Peter Dembowski nous dit dans la préface de son édition de l'Orloge que Froissart aurait eu l'occasion de voir l'horloge et de parler avec Henri de Vic avant sa réalisation en 1370, et que « les historiens de l'horlogerie associent le poème... avec l'horloge du palais » 7. Même si rien ne permet d'affirmer que le poème fait explicitement référence à l'horloge du palais, il est clair que Froissart avait des connaissances en horlogerie mécanique.

    L'Orloge amoureus est un poème de 1174 vers, conservé dans un seul manuscrit (BnF fr. 830), qui raconte l'état d'âme de l'amant en s'appuyant à la fois sur les personnifications amoureuses familières dès le Roman de la Rose et sur l'horloge mécanique. Malgré sa vision assez conventionnelle de l'amour, résumer le texte est difficile en raison de l'absence d'action – Michel Zink décrit, non sans ironie, le caractère statique et atemporel du poème – et de sa structure tripartite. Après une brève introduction, le texte prend la forme de trois « modes » discursifs simultanés que j'appellerai « mode technique », « mode allégorique » et « mode direct ». Les passages écrits sur le mode technique, copiés à l'encre rouge dans le manuscrit, traitent du fonctionnement mécanique de l'horloge. Les parties écrites sur le mode allégorique établissent les similitudes entre les différentes parties de l'horloge et des objets ou des qualités, en utilisant le langage courant des personnifications courtoises (par exemple, le dyal représente Dous Pensier). Le mode direct est constitué d'une adresse directe à la dame aimée. Ces trois modes alternent, dans ce même ordre, tout au long du texte.

    Le poème commence avec une identification qui prend quasiment le caractère d'une équation mathématique.

    « Je me puis bien comparer a l'orloge,
    Car quant Amours, qui en mon coer se loge,
    M'i fait penser et mettre y mon estude,
    G'i aperçoi une similitude. » (vv. 1-4)

    Le système représentatif du poème se fonde sur cette identification entre l'amant et l'horloge. Avant de procéder à une interprétation du poème, il convient de s'interroger sur la nature de l'horloge à la fin du xive siècle.

    Tout d'abord, le mot horloge et ses variantes médiévales – oriloge, ologe, et cætera – sont des néologismes, et jusqu'au dix-neuvième siècle, le mot horloge a la particularité de pouvoir être masculin ou féminin, une particularité qui survit, à titre d'exemple, dans le nom du Gros Horloge de Rouen. Froissart l'emploie au masculin, genre qui facilite son assimilation au corps de l'homme, souligne son identification avec le cœur masculin et consolide son rôle dans la représentation de l'état d'âme d'un amant.

    Avant la fin du treizième siècle, la plupart des villes et monastères dépendaient de cadrans solaires ou de clepsydres (horloges hydrauliques), ce qui posait un problème quand le soleil ne brillait pas ou quand l'eau gelait en hiver. L'innovation technique qui permet le développement de l'horloge mécanique est l'échappement à roue de rencontre, qui s'articule avec le mécanisme régulateur appelé le foliot. Bien que certains croient voir ces structures attestées plus tôt – dans un dessin de Villard de Honnecourt notamment –, rien ne nous permet de placer l'invention de l'horloge mécanique avant les dernières années du xiiie siècle. Les premières attestées datent du début du xive siècle. Elles furent installées à Milan, à Padoue, à Pavie, à Bruges, à Strasbourg. La vogue de l'horloge dans les années 1360-1370 s'est manifestée par une véritable explosion du nombre des villes qui en possèdent.

    Très peu ont survécu – les plus anciennes qui sont toujours en état de marche sont celles de Salisbury et de Wells, dit-on. Mais notre connaissance de ces machines est étayée par quelques textes de l'horlogerie du xive siècle qui nous sont parvenus : le Tractatus Astrarii de Giovanni de'Dondi (1364) et un traité anonyme en français. La très célèbre horloge astronomique de Dondi était une structure heptagonale avec une face qui montrait le mouvement de chacune des « planètes » connues, ainsi qu'une horloge proprement dite et un calendrier des fêtes mobiles. Philippe de Mézières, dans son Songe du vieil pélerin, exprime son admiration pour l'Astrario du maître italien :

    « Entre lesquelles œuvres il a fait un grant instrument, par aucuns appelle l'espere ou orloge du mouvement du ciel. Ouquel instrument sont tous les meuvemens des signes [et] des planetes, avecques leurs cercles et epicycles et differences, par multiplication de roes sans nombre, avecques toutes leurs parties ; et a chacune planete, en ladicte espere, est particulierement son mouvement par telle maniere que a toutes heures et momens du jour et de la nuyt on puet veoir clerement en quel signe et degre les planetes sont, et estoilles sollennelles du ciel. Et est faicte si soubtilment ceste espere que nonobstant la multitude des roes, qui ne se pourroient nombrer bonnement sans deffaire l'instrument, tout le meuvement d'icelle est gouverne par ung seul contrepoiz, qui est grant merveille [...] 8. »

    Cette description de l'horloge astronomique souligne la complexité de sa structure, gouvernée par des principes mathématiques : les cercles, la multiplication, l'interaction entre l'un et le multiple. Mézières remarque aussi que l'on ne pourrait pas compter les roues de l'horloge sans la défaire, une observation qui souligne l'importance du nombre dans la structure de l'horloge ainsi que l'air de mystère qui entourait sa fabrication. Et comme plusieurs autres auteurs de son époque, Mézières est impressionné par le fait que l'horloge fonctionne jour et nuit, « a toutes heures et momens ». Ici il faut remarquer qu'à l'époque de Froissart les heures ne sont pas encore subdivisées en minutes : une horloge n'a qu'une aiguille et l'heure est la principale unité temporelle. Certains textes techniques font référence au moment, un terme précis qui désignait la quarantième partie d'une heure, ou une minute et demie. Mais en raison de l'imperfection des premières horloges, l'usage du moment comme mesure restait cantonné au plan théorique.

    Jusqu'ici je n'ai parlé que des horloges publiques, pour la simple raison qu'au xive siècle les horloges privées étaient très rares ; les rois de France en possédaient, mais les horloges portatives n'étaient pas communes avant le xve siècle. Et il faut ajouter qu'au xive siècle ni les horloges privées ni les horloges publiques n'étaient fiables. Les premières horloges mécaniques, même la fameuse horloge du palais, avaient tendance à perdre au moins une heure par journée : Carlo Cipolla cite, par exemple, le vers populaire « l'horloge du palais, elle va comme il lui plait 9 ». C'est donc à juste titre, semble-t-il, que Jacques Le Goff affirme que « plus qu'outil de la vie quotidienne, elle est encore une merveille, un ornement, un jouet dont la ville s'enorgueillit. Elle appartient à la parure urbaine, au prestige plus qu'à l'utilité 10 ».

    L'horloge – et si nous poursuivons l'équation de Froissart, l'amant – est donc un objet fort admiré mais encore imparfait. Froissart souligne cependant les qualités de l'horloge théorique sans mentionner les défauts de l'horloge réelle.

    « Car l'orloge est, au vrai considerer,
    Un instrument tres bel et tres notable
    Et s'est aussi plaisant et pourfitable,
    Car nuit et jour les heures nous aprent
    En l'absense meisme dou soleil. »            (vv. 6-10)

    Froissart semble reprendre le langage du décret (supposé) de Charles V, « luise le soleil ou non », que nous avons déjà remarqué chez Philippe de Mézières. Après cet éloge de l'horloge, Froissart termine la partie introductive du poème, et l'énonciation en trois modes commence.

    Les trois modes du discours

    Je propose maintenant de démêler les trois modes du récit afin de les analyser individuellement, et ensuite de les réunir, tout en considérant la manière dont ce jeu triple mène à une réflexion sur l'allégorie amoureuse et fait partie d'un jeu plus large sur le nombre. Je vais d'abord regarder les passages écrits sur le mode technique, où Froissart démontre sa connaissance de la théorie de l'horlogerie. Ces parties du texte témoignent d'une préoccupation mathématique qui, à mon avis, caractérise la structure du poème entier.

    Ces passages prennent le caractère d'un traité d'horlogerie en vers, avec des précisions mathématiques et un lexique spécialisé. Les vers 201 à 220 décrivent les deux premières roues et le foliot ; les vers 347 à 366, le dyal et les clochettes ; 599 à 614, la sonnerie ; et 927 à 948, l'horloger. La description du dyal montre à quel point Froissart maîtrisait le vocabulaire spécifique de l'horlogerie. Ce mot est un néologisme dont Froissart nous donne l'une des premières attestations dans la langue française.

    « Aprés affiert a parler dou dyal,
    Et ce dyal est la roe journal
    Qui, en un jour naturel seulement,
    Se moet et fait un tour precisement,
    Ensi que le soleil fait un seul tour
    Entour la terre en un seul jour.
    En ce dyal, dont grans est li merites,
    Sont les heures vint et quatre descrites. » (vv. 347-354)

    Cet extrait est intéressant pour sa considération du concept du naturel. Le dyal se trouve à l'intersection du naturel (le jour marqué par le mouvement apparent du soleil) et du mécanique (le jour marqué par les roues, les aiguilles et les clochettes). Ce jeu de la nature et de la technologie est également implicite dans le jeu qui structure le poème, celui du sentiment et de la machine. Mais c'est le monde mécanique qui domine le discours de ce mode technique, et la nature et l'homme y prennent une importance réduite. Avec la description de l'horloger dans le dernier passage écrit sur le mode technique, un élément humain est enfin introduit dans ce discours.

    « Et pour ce que li orloges ne poet
    Aler de soi, ne noient se moet,
    Se il n'a qui le garde et qui en songne,
    Pour ce li fault a sa propre besongne
    Un orlogier avoir, qui tart et tempre
    Diligamment l'aministre et attempre
    Les plons relieve et met a leur devoir,
    Et si les fait rieuleement mouvoir,
    Et les roes amodere et ordonne,
    Et de sonner l'ordenance lor donne.
    Encores met li orlogiers a point
    Le foliot, qui ne cesse point,
    Le fuiselet et toutes les brochetes
    Et la roe qui touce les clochetes.
    Sont les heures, qui ens ou dyal sont,
    De sonner tres certainne ordenance ont,
    Mes que levee a point soit la destente.
    Encores poet moult bien, selonc m'entente,
    Li orlogiers, quant il en a loisir,
    Toutes les fois qu'il li vient a plaisir,
    Faire sonner les clochetes petites
    Sans desrieuler les heures dessus dittes. » (vv. 927-948)

    Dans le passage allégorique qui suit, Froissart dit que l'horloger représente Souvenir, mais il est aussi facile de voir les rapports entre l'horloger et la figure du poète. Celui qui soigne (songne) l'horloge amoureuse est aussi celui qui l'a songé, et qui lui donne « ordenance ». Ce passage est aussi unique parmi les extraits « techniques » du poème parce qu'il introduit l'idée du loisir et de la musique. L'horloge est souvent mentionnée ou illustrée comme instrument de musique. Dans le Roman de la Rose, Jean de Meung présente l'horloge non comme une machine à mesurer le temps, mais comme un instrument composé de clochettes. La musique, comme l'horloge, est fondée sur le concept de mesure : selon Christine de Pizan dans le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V, « l'art de musique peut mesurer son 11 ». La musique apporte aussi le plaisir et le repos, comme le dit, entre autres, Eustache Deschamps dans l'Art de dictier. On peut remarquer que ce passage de Froissart est le seul dans lequel le poète mentionne le plaisir que l'on peut tirer de la structure mécanique de l'horloge. Cet emploi de la machine serait analogue à l'amour physique (l'emploi du corps pour le plaisir) et à la poésie (la création d'une « musique » des paroles).

    Comme je viens de le dire, ces passages techniques sont caractérisés par une précision conceptuelle et lexicale. Paul Zumthor a déjà remarqué les ressemblances entre la description de Froissart et celle d'un traité technique anonyme, datant du milieu ou de la seconde moitié du xive siècle 12. Le traité, caractérisé dans son incipit comme « ung petit traictie pour faire horoleiges en plusieurs manieres selon l'ymagination du fayseur » (275) – ainsi que la Recapitulatio brevis en latin qui le suit – décrit le même genre d'horloge que celui de l'Orloge amoureus. La précision mathématique de ce traité pratique a déjà été notée par Paul Zumthor : en effet, il s'agit d'un système sophistiqué dans lequel l'horloge devient symbolique de l'union du pair et de l'impair. C'est précisément de cette union que dépend l'horloge mécanique, dont l'échappement à roue de rencontre fonctionne en faisant s'articuler une roue avec un nombre pair de dents et une autre avec un nombre impair de dents : « Et est assavoir que en ladite roue du foliot doivent les dens estre toujours non per affin que au rencontre, quant elle fiert a une des dens, elle puisse eschapper par entre les aultres dens... » (276). Ainsi, dans le traité anonyme, nous voyons que la roue centrale a un nombre pair de dents ; le foliot, un nombre impair ; la roue du soleil, pair ; la roue de la lune, impair.

    Bien sûr, l'auteur du traité d'horlogerie emploie le langage spécialisé de son métier ; il est donc intéressant de regarder les ressemblances entre son lexique et le langage de Froissart dans l'Orloge amoureus. Le mot dyal, dont j'ai déjà signalé l'usage chez Froissart, est expliqué par l'horloger anonyme : « il est dit dyal pour ce qu'il ne fait en ung jour que ung tour » (279). D'après Paul Zumthor, la définition du terme dans un ouvrage pourtant spécialisé atteste sa nouveauté. Cet exemple ne fait que confirmer la sophistication technique de la description de l'horloge que nous donne Froissart.

    Mais la nouveauté chez Froissart est restreinte à son mode technique et à la manière dont le poète lie sa matière « moderne » aux conventions de l'allégorie amoureuse. Car dans les passages du mode allégorique, Froissart attribue une signification à chaque partie de l'horloge de façon très explicite, voire plate. Nous pouvons prendre comme exemple la description de la première roue aux vers 99 à 108.

    « Or voeil parler de l'estat de l'orloge.
    La premerainne roe qui y loge,
    Celle est la mere et li commencemens
    Qui fait mouvoir les aultres mouvemens
    Dont l'orloge a ordenance et maniere.
    Pour ce poet bien ceste roe premiere
    Segnefier tres couvignablement
    Le vrai desir qui le coer d'omme esprent ;
    Car desir est la premiere racine
    Qui en amer par amours l'enracine. »

    D'abord, il semble qu'il n'y ait rien de subtil ici : le poète nous déclare sans ambiguïté que la « premerainne roe » signifie Désir. Il fait de même avec les contrepoids, qui représentent Beauté et Plaisance ; la seconde roue, Attemprance ; le foliot, Paours ; le dial, Douç Penser ; et cætera. Il va jusqu'à attribuer une signification allégorique à chacune des vingt-quatre « broquetes ». Françoise Paheau a remarqué que les désignations de ces personnages allégoriques font preuve d'une attitude « tout à fait favorable » envers l'horloge, car il n'y a pas de personnages négatifs tels Malebouche ou Dangier 13. Pourtant, Paour est présent dans l'allégorie. De plus, Malebouche et Dangier n'auraient aucune place dans le système de l'Orloge amoureus : comme l'horloge figure le cœur de l'amant – c'est-à-dire son univers interne –, on ne s'attendrait pas à trouver des obstacles externes comme Malebouche ou Dangier, qui représentent les attitudes des jaloux ou de la dame.

    Revenons maintenant aux derniers passages cités. Dans l'explication de la première roue il est question de mouvement, d'ordenance et de mesure, tout comme dans le passage qui décrit l'horloger qui « diligamment l'aministre et attempre » (v. 932). « Attempre » est un mot-clé : il n'est donc pas surprenant que « Attemprance » figure parmi les personnages évoqués dans le discours allégorique. En effet, dans l'univers iconographique du Moyen Âge tardif, Temperantia est souvent associée à l'horloge.

    Même avant l'époque de Froissart, il est commun de voir des descriptions ou des images qui représentent l'univers comme une horloge, et qui représentent Dieu en horloger avec son compas. Pourtant, l'association entre « Attemprance » et une partie de l'horloge semble trouver son origine chez Froissart. C'est une association que Nicole Oresme reprend dans son Livre du ciel et du monde (1377) et qui se développe encore plus dans l'Epistre Othéa de Christine de Pizan (1400-01). Dans ce texte, composé lui aussi de trois « modes » – texte, glose et allégorie –, « Attrempance » est la seconde figure à être commentée, juste après sa « seur germaine », la déesse Othéa. Ici c'est tout le corps humain, et non seulement le cœur, qui peut être représenté par l'horloge : « et pour ce que nostre corps humain est composé de diverses choses et doit estre attrempé selon raison, peut etre figuré à l'orloge qui a plusieurs roes et mesures ; et toutefoiz ne vault rien l'or[lo]ge, s'il n'est attrempé, semblablement non fait nostre corps humain, se attrempance ne l'ordonne 14 ». « Attrempance » pèse et mesure l'activité humaine comme un horloger règle l'activité d'une horloge : « Car s'elle n'en faisoit le pois,/ Tout ne te vauldroit pas un pois » (vv. 25-26, p. 203). Ce lien entre la mesure du temps et la mesure dans l'activité humaine est souligné dans le programme iconographique des enluminures qui accompagnent souvent l'Epistre Othea : cette série d'enluminures inclut l'image d'« Attemprance » qui règle le mécanisme d'une horloge. Cette figure ressemble beaucoup à celle de Sapientia qui apparaît dans certains manuscrits de l'Horloge de Sapience d'Henri Suso. Et Dohrn-Van Rossum cite aussi un groupe d'enluminures du xve siècle qui figurent Temperantia d'une manière particulière : elle est entourée par les grands monuments de la technologie moderne – des lunettes, une bride, des éperons, un moulin à vent, et sur sa tête, une horloge. Nous voyons alors que l'association entre la mesure mécanique et la mesure comme vertu, faite par Froissart, a une longue postérité dans la littérature et l'iconographie médiévales.

    Naturellement, chez Froissart, ce concept de la mesure s'applique aussi bien au comportement de l'amant qu'à la mécanique de l'horloge. Dans l'explication allégorique de la roue de la sonnerie et de son contrepoids, Froissart fait l'éloge de la mesure.

    « Et pour ce qu'il [le vrai amant] aussi ne passe point
    La mesure de raison, fors a point,
    Il li convient, par bonne entention,
    Mettre en son coer toute discretion. » (vv. 649-652)

    Ce souci de l'ordenance relie les trois modes du texte, et la structure triple de l'ouvrage a pour effet d'imposer l'ordre de l'horloge mécanique sur le désordre fondamental de l'amour. Dans les passages écrits dans le mode direct, l'auteur s'engage souvent dans une discussion du problème de l'ordre en relation avec une réflexion sur la composition de l'ouvrage.

    « Si vous suppli, ma dame, qu'en ceste oevre
    Vous m'escusés, se rudement g'i oevre.
    Mes pour le mieulz a mon pooir m'ordonne,
    Selonk le droit que li orloges donne,
    A qui me sui proprement comparés. » (vv. 335-39)

    Ainsi Froissart réitère la comparaison avec laquelle il a ouvert son texte, cette fois dans le contexte de l'ordenance mécanique. « Le droit que li orloges donne » est une ordonnance qui s'impose sur, et dans, le corps de l'amant-poète. La comparaison de base entre le poète et l'horloge nécessite une assimilation, une incorporation de la machine chez l'amant. Le sujet amoureux devient une espèce d'homme bionique – la machine remplace un de ses organes vitaux, et il se comporte « A la façon proprement de l'orloge,/ Dont Amours fait de mon coer chambre et loge » (vv. 49-50). À la fin du poème, ce lien entre l'homme et la machine est de nouveau souligné.

    « Car je sui la chambre et la maison
    Ou mis est li orloges amoureus,
    Sui de mouvoir telement curïeus
    Que n'ai aillours entente, soing et cure,
    Ne Nature riens el ne me procure
    Fors que tout dis mouvoir sans arrester.
    Ne je ne puis une heure en paix ester,
    Meïsmement quant je sommeille et dors. » (vv. 1152-59)

    Nature l'aide donc à imiter la machine, car la perturbation de l'amant est constante, tout comme le mouvement de l'horloge. Ce passage peut nous rappeler la description aux vers 9 et 10 de l'horloge qui « nuit et jour les heures nous aprent/ En l'absense meisme dou soleil » ; ici l'analogie entre l'horloge royale, l'horloge de Froissart et l'amant est claire. Même les mutations qui ont lieu dans l'âme de l'amant s'expliquent par la structure et le langage de l'horloge.

    « Quanque je voi, une heure bien me plest,
    Et puis tantos ce que voi me desplest.
    Une heure voeil je estre en compagnie
    L'autre le fui, avoir ne le voeil mie. » (vv. 735-738)

    Comme nous l'avons déjà mentionné, l'invention de l'horloge mécanique provoque un changement profond dans le sens du mot « heure ». La régularité relative des heures modernes était soulignée par les clochettes qui sonnaient à des intervalles réguliers. Et si l'horloge marque le passage des heures avec la musique, le poète marque les mouvements de son âme avec la poésie. Dans le texte de Froissart, la sonnerie – et, par analogie, sa propre production poétique – évoque en même temps la mélodie et la maladie.

    « En ce frefel et en celle rihote
    Fai maint souspir, maint plaint et mainte note
    Qui ne sont pas de sons melodïeus,
    Mes attemprés de chans maladïeus. » (vv. 857-860)

    Le rôle d'« Attemprance » est d'intercaler le positif et le négatif, d'attemprer l'harmonie (« les sons melodïeus ») avec la discorde (« les chans maladïeus ») afin de trouver un équilibre entre les deux. Le poème en est le résultat. Cependant, cette « sonnerie » poétique doit forcément dépasser la sonnerie mécanique de l'horloge. La machine, même si elle remplace le cœur de l'amant, est insuffisante en soi et doit être complétée par l'intellect de l'amant.

    « Car se le vrai amant ne concevoit
    En sa pensee, et aussi s'il n'avoit
    Esperance et imagination
    De parvenir, a la conclusion,
    A son entente et a ce qu'il desire,
    Les heures amoureuses, au voir dire,
    Ne poroient sonner souffissament. » (vv. 477-483)

    Cette déclaration pourrait nous aider à comprendre la structure du poème : le mode « direct » vient toujours « à la conclusion » après les deux autres parce que le poète doit supplémenter la mécanique technique et allégorique avec sa propre pensée et sa propre imagination afin de produire un texte qui « sonne souffissament ».

    La jonction des trois modes peut nous sembler parfois trop évidente, surtout en ce qui concerne les liens explicites entre les modes technique et allégorique. En revanche, la correspondance entre la mécanique et l'allégorique n'est jamais aussi stable qu'elle ne le semble : tout en établissant ces analogies, le poète attire notre attention sur le fait qu'il s'agit, en effet, d'un jeu. La première roue poet bien représenter le désir ; ainsi Froissart indique que sa configuration des figures conventionnelles de l'allégorie amoureuse n'est qu'une configuration parmi une multitude de possibilités. Cette expression de potentialité plutôt que de vérité absolue – poet bien – crée un espace entre les niveaux technique, allégorique et direct du texte, qui permet un glissement et qui constitue une reconnaissance de l'artifice de la poésie amoureuse. Si l'horloge du discours technique est liée à l'amant du discours direct, c'est seulement grâce à l'intervention du discours allégorique ; mais admettre que le rapport entre le niveau technique et le niveau direct n'est qu'un rapport possible met en doute la validité, voire la raison d'être, du niveau intermédiaire. Douglas Kelly constate que la sublimation de l'auteur dans une figure comme l'horloge mène à un effet de « dépersonnalisation » 15. À mon avis, l'aveu de l'artifice implicite dans les mots poet bien suggère que ce n'est pas le recours à une machine pour figurer un sentiment, mais plutôt le recours aux figures allégoriques, qui effectue cette dépersonnalisation.

    Je lis donc la division du texte en trois modes distincts comme une mise à nu du processus allégorisant. Le poème s'approche par étapes de l'expérience amoureuse, passant de la machine à l'homme à travers les conventions allégoriques. Comme le traité d'horlogerie, le poème de Froissart expose le mécanisme de la machine qu'il décrit : dans ce cas, la « machine » en question est l'écriture amoureuse. Le texte commence par une espèce de défi – je me puis bien comparer a l'orloge – et le reste du poème constitue une preuve de ce théorème. Froissart montre comment un poète poet bien choisir n'importe quel objet (Froissart tire son exemple de l'actualité, la nouvelle horloge du palais), attribuer des significations allégoriques aux parties de cet objet, et traduire ce système allégorique en un appel direct à une dame 16.

    Le thème de l'horloge entre texte et image

    Son analogie principale rapproche l'Orloge amoureus de quelques autres textes du xive siècle qui emploient la figure de l'horloge. Cependant, la complexité du jeu entre amant, personnification allégorique et horloge sépare le texte de Froissart des autres. Une comparaison avec deux autres textes évoquant l'horloge peut permettre de saisir l'originalité de Froissart : la Divine Comédie de Dante, et l'un des textes plus populaires du Moyen Âge tardif, l'Horologium sapientiae (ou Horloge de Sapience) d'Henri Suso.

    Chez Dante, le temps, et la capacité d'en jouir, font partie de son système élaboré de punitions et de récompenses. Le vestibule des enfers, par exemple, existe dans une « aura senza tempo » (Inferno III, v. 29), alors que l'auteur emploie l'analogie de l'horloge – une description souvent citée par les historiens de l'horloge – dans le Paradiso chant X, vers 139-148. Ici le pèlerin-narrateur fait une comparaison entre une horloge, dont la sonnerie est décrite avec délicatesse, et la « gloriosa rota » d'âmes qu'il voit dans la sphère du soleil.

    « Indi, come orologio che ne chiami
    ne l'ora che la sposa di Dio surge
    a mattinar lo sposo perché l'ami,

    che l'una parte e l'altra tira e urge,
    tin tin sonando con sì dolce nota,
    che 'l ben disposto spirto d'amor turge ;

    così vid'ïo la gloriosa rota
    muoversi e render voce a voce in tempra
    e in dolcezza ch'esser non pò nota

    se non colà dove gioir s'insempra. »

    « Puis, comme une horloge qui nous appelle,
    à l'heure où se lève l'épouse de Dieu
    pour faire matine à son époux afin qu'il l'aime,

    tandis qu'une pièce tire et pousse l'autre,
    en sonnant et tintant en notes si douces
    que l'esprit préparé se gonfle d'amour ;

    je vis ainsi la roue glorieuse
    se mouvoir et accorder ses voix
    dans une douceur qu'on ne peut connaître

    sinon là où la joie s'éternise. »

    Comme dans le Roman de la Rose, Dante souligne l'aspect sonore de l'horloge : le doux tin tin de l'horloge est assimilé au son des voix célestes. Il existe aussi un rapport plus formel entre les roues de l'horloge et la « gloriosa rota » composée d'âmes saintes, ainsi qu'une évocation du mouvement – un mot qui, comme nous le savons, est d'une grande importance dans l'horlogerie. Cependant, ces comparaisons restent plus ou moins implicites, et l'accent est mis plus sur la fonction de l'horloge – elle appelle « la sposa di Dio » aux prières – que sur sa structure.

    Cette même indifférence aux mécanismes de l'horloge caractérise aussi l'Horologium sapientiae d'Henri Suso, un ouvrage qui donne, en principe, une importance majeure à la figure de l'horloge par rapport à la Divine Comédie de Dante. Le texte de l'Horologium sapientiae nous est parvenu dans à peu près cinq cents manuscrits des xive et xve siècles. Il existe des traductions médiévales en plusieurs langues vulgaires ; la traduction française date de 1389. En abordant ce texte, le titre nous donne l'impression que l'image de l'horloge y sera centrale. Mais en fait, la figure de l'horloge n'est pas indispensable au texte, et à part le titre et une brève mention dans le prologue, l'horloge est tout à fait absente. Comme Froissart, Suso établit la métaphore de l'horloge dans son prologue :

    « Unde et praesens opusculum in visione quadam sub cuiusdam horologii pulcherimmi rosis speciosissimis decorati et cymbalorum bene sonantium et suavem ac caelestem sonum reddentium cunctorumque corda sursum movientum varietate perornati figura dignata est ostendere clementia salvatoris 17. »

    Ou, comme le dit la traduction française, Sapience « lui monstra ung horloge ou ologe de tresbelle et de tresnoble forme dont les roes estoient excellentes et les cloches doulcement sonnans et par la diverse et subtille façon de lui, tout cuer humain semerveilloit et esjoissoit en regardant ycelui 18 ». Cette description de l'horloge rappelle celle de Dante dans son insistance sur les « cymbalorum bene sonantium » et l'appel à la prière. Suso ajoute le détail de la décoration de l'horloge avec des roses – un détail apparemment mal compris par le traducteur français, qui parle de « roes » au lieu de « roses ». Après le prologue, l'Horologium sapientiae est divisé en vingt-quatre chapitres, ce qui le rapproche en même temps du livre d'heures (et, par extension, de l'ancien système canonial marquant le passage du temps) et de l'horloge. Mais ce lien avec l'horloge n'est jamais mentionné, et il semble que l'horloge ne figure pas dans le reste du texte : ayant appelé le lecteur à la contemplation de Dieu, ayant ainsi joué son rôle, elle est mise de côté et oubliée. Malgré son absence de la majeure partie du texte, la figure de l'horloge semble avoir captivé l'imagination de plusieurs enlumineurs qui ont illustré les manuscrits de l'Horologium et de ses traductions vulgaires. La plus connue de ces enluminures est celle du manuscrit de la Bibliothèque Royale de Bruxelles (MS IV.111, fol. 13v.), qui date du milieu du xve siècle et qui met en scène « Sapience » et son « Disciple » entourés d'une variété d'horloges et d'instruments astronomiques. Le manuscrit inclut une table des enluminures ou « declaration des hystoires », ajoutée pendant la deuxième moitié du xve siècle, qui décrit cette image de la façon suivante :

    « Pource que comme ie dit pou davant la divine sapience est toujours soigneuse du sauvement de toute humaine creature, elle rallume les étains, elle rechauffe les refroidis et resuscite les endormis. En ce signifiant est nommé ce livre horloge de sapience. Et en cette figure est dame sapience comme ordonnant et gouvernant une horloge et ung refueil disent en son de plusieurs clochettes ante secula qui deus est tempora homo factus est in maria, lequel verset est approprie convenablement à notre seigneur ihucrist qui est l'eternelle sapience et filz de dieu le pere et a prins char humaine et nasqui en la vierge marie. Et à ses piez est le disciple contemplant le maintien de sa maistresse 19. »

    Une enluminure dans un manuscrit de Vienne (NB cod. 2574, fol. 24r.), très proche de celle-ci, montre la « Sapience » qui ajuste une horloge. Ces images, surtout celle du manuscrit de Bruxelles, ont eu une valeur importante pour les historiens de l'horlogerie ; comme le poème de Froissart, elles fournissent une représentation des horloges de l'époque qui est, de toute évidence, assez exacte. Malheureusement, le texte de l'Orloge amoureus dans le seul manuscrit qui nous le transmet n'est orné d'aucune enluminure. Cependant, le texte nous donne une très bonne idée de ce qu'était une horloge mécanique en 1368. L'assimilation de la machine au corps de l'amant est réalisée par un jeu subtil et non sans intérêt qui expose et, d'une certaine manière, déconstruit le travail que fait le créateur d'une allégorie amoureuse. C'est précisément à cause de cette réflexion sur l'instabilité du texte allégorique que je ne peux pas adhérer à l'affirmation de Huizinga selon laquelle l'Orloge amoureus est un poème sans originalité et sans intérêt.

    Notes de bas de page :

    1  Une première version de cet article a été présentée au séminaire de Mme le professeur Jacqueline Cerquiglini-Toulet, « Le Nombre de la poésie », en mai 2004. Je voudrais remercier Mme Cerquiglini-Toulet et Mlle Delphine Louis pour leurs commentaires et leurs corrections. Les fautes qui restent sont miennes.
    2  J. Huizinga, L'Automne du Moyen Âge, Paris 2002, p. 319.
    3  BnF ms. fr. 176, fo 13vo. Cité dans G. Dohrn-van Rossum, History of the Hour : Clocks and Modern Temporal Orders, Chicago, 1996, p. 405, note 4.
    4  Jacques Le Goff, « Au Moyen Âge : Temps de l'Église et temps du marchand » dans Pour un autre Moyen Âge : Temps, travail et culture en occident, Paris, 1977, p. 46-65.
    5  Ibid., p. 218.
    6  C. de Pizan, Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V, S. Solente éd., Paris, 1936, p. 42.
    7  J. Froissart, Le Paradis d'Amour/L'Orloge amoureus, P. Dembowski éd., Genève, 1986, p. 11. Toutes les citations de Froissart sont extraites de cette édition.
    8  Ph. de Mézieres, Le Songe du vieil pélerin, G. W. Coopland éd., 2 t., Cambridge, 1969, p. 606.
    9  C. Cipolla, Tecnica, società e cultura : Alle origini della supremazia tecnologica dell'Europa (xiv-xvii secolo), Bologne, 1967, p. 27.
    10  J. Le Goff, loc. cit., p. 75.
    11  C. de Pizan, op. cit., p. 45.
    12  BAV, ms. lat. 3127. Publié et commenté par P. Zumthor, « Un traité français d'horlogerie du xive s. », Zeitschrift für romanische Philologie, 73, 1957, p. 274-287.
    13  F. Paheau, « Scientific Allusions and Intertextuality in Jean Froissart's L'Orloge amoureus », Journal of Medieval and Renaissance Studies, 20, 1990, p. 256.
    14  C. de Pizan, Epistre Othea, G. Parussa éd., Genève, 1999, p. 202.
    15  D. Kelly, « The Genius of the Patron : The Prince, the Poet, and Fourteenth-Century Invention », dans R. Barton Palmer éd., Chaucer's French Contemporaries : The Poetry/Poetics of Self and Tradition, New York 1999, p. 11.
    16  Il ne serait pas sans intérêt de noter ici la ressemblance avec un autre texte allégorique construit à partir d'une analogie entre un personnage et un objet : il s'agit du Dit de la Harpe de G. de Machaut. Les premiers vers de ce dit – « Je puis trop bien ma dame comparer/a la harpe... » (BnF, ms. fr. 1584, fo 174r.) – ont sans doute eu une influence directe sur l'Orloge amoureus.
    17  H. Suso, Heinrich Seuses Horologium Sapientiae, D. Planzer éd., Fribourg 1977, p. 364-65.
    18  Cité dans E. P. Spencer, « L'Horloge de Sapience, Bruxelles, Bibliothèque Royale, MS. IV.111 », Scriptorium, 17, 1963, p. 282-283.
    19  fo 3 ; cité dans E. P. Spencer, op. cit., p. 283.

    Julie  Singer

    Department of Romance Studies, 205 Language Center, Box 90257, Duke University, Durham, NC 27708, USA

    Pour citer cet article :

    Julie Singer, «L'horlogerie et la mécanique de l’allégorie chez Jean Froissart », Médiévales, 49 (2005), http://medievales.revues.org/document1254.html.
     


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  • Technique Poetique, Discours Technique: L'orloge Amoureus De Jean Froissart

    Journal article by Patrick Wheeler; The Romanic Review, Vol. 90, 1999 (extrait, à lire en entier sur QUESTIA, site payant)

    Journal Article Excerpt

     
    TECHNIQUE POETIQUE, DISCOURS TECHNIQUE: L'ORLOGE AMOUREUS DE JEAN FROISSART.

     

    by Patrick Wheeler

     

     

    Auteur celebre des Chroniques, Jean Froissart (ca.1335-1400) a aussi laisse une oe uvre poetique appreciable. Parmi ces poemes, l'Orloge amoureus se distingue par l'originalite de son propos: la representation de la vie affective d'un amant courtois par la figure d'une horloge mecanique du XIVeme siecle. "Un dittie d'amours", c'est-a-dire un court traite de didactisme courtois, l'Orloge amoureus propose une analogie entre les qualites et sentiments d'un amant courtois et les parties et operations d'une horloge a poids et a echappement mecanique.

     

    Jusqu'a ces dernieres annees, la critique litteraire a eu tendance a deprecier les possibilites d'innovation poetique fournies par la figure de l'horloge. Tout en constatant, par exemple, que "l'objet de la comparaison reste original" (Dembowski 1978, 22), Peter Dembowski ecrit pourtant que: "Ce qui est interessant du point de vue litteraire et ce qui fait la veritable originalite de notre poeme, c'est que l'utilisation de l'horloge, cela devient vite evident, va de pair avec un traitement traditionnel et conventionnel des themes de l'amour courtois. La fascination evidente pour l'invention technique ne diminue en rien le caractere foncierement conservateur de la poesie de Froissart" (Dembowski 1978, 24). Appreciation plus charitable, d'ailleurs, que celle de B.J. Whiting, qui juge que ce poeme est "un ouvrage rococo, onze cent soixantequatorze vers decasyllabes d'allegorie monstrueuse" (Whiting 192). Au mieux alors, l'integration de cette "invention technique" ne provoque aucune innovation ou invention poetique.

     

    Les historiens, par contre, ont presque sans exception considere la description que donne Froissart des mecanismes de l'horloge comme un document important pour l'histoire de l'horlogerie. Ils accordent tres vite une valeur quasi-mimetique a l'Orloge et relient sa precision descriptive a son referent suppose, l'horloge mecanique de Heinrich von Wieck, dont l'installation au Palais-Royal fut achevee vers 1370. L'absence apparente d'invention poetique a incite plusieurs lecteurs a voir dans l'Orloge amoureus une sorte de vue eclatee d'une horloge mecanique, c'est-a-dire une photographie ou un dessin qui en montre distinctement les diverses parties ainsi que leur disposition dans l'objet. L'historien John Drummond Robertson constate que ce texte "nous fournit, dans ces quelques passages ou l'historien renonce aux fantaisies du poete, une image merveilleusement precise de l'horlogerie de l'epoque. [...] Les details techniques contenus dans le poeme sont tellement exacts et tellement exempts d'embellissement poetique que Froissart a du les tirer d'une inspection minutieuse du mecanisme et probablement d'une explication de son operation donnee par von Wieck lui-meme" (Robertson 53). Pour Robertson, ce dittie possede une valeur historique parce qu'au lieu d'etre soumis aux distortions rhetoriques qui creent la valeur du texte poetique, il provient de l'experience "vecue" du celebre chroniqueur, Jean Froissart.(1) La representation de l'horloge qu'offre Froissart est censee etre une sorte de dessin mecanique, une description proto-"objective" depourvue de tout ornatus, de toute parure rhetorique.

     

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  • Varia

    L’exemple chevaleresque dans la poésie de Jean Froissart.

    Silvère Menegaldo

    Texte intégral

    1Malgré le caractère exceptionnel du Roman de la Rose de Guillaume de Lorris dans le paysage littéraire de la première moitié du XIIIe siècle, le récit de ce songe allégorique est loin d'être dépourvu de liens avec les oeuvres qui l'ont précédé, en particulier les romans de chevalerie. La structure du récit et son déroulement, qui en font une quête à caractère initiatique, de fréquentes références à l'univers courtois et chevaleresque, autant d'éléments qui laissent apparaître le roman, tel qu'il a été constitué par Chrétien de Troyes, à l'arrière-plan de l'oeuvre de Guillaume de Lorris. Bien plus, l'univers chevaleresque vient parfois affleurer à la surface du texte, comme pour donner, par la mention d'un nom bien connu par exemple, un indice de sa présence. Ainsi le dieu d'Amour délivrant son enseignement au héros narrateur, en lui commandant d’abord de renoncer à toute médisance, se trouve illustrer ses propos d'exemples empruntés au roman de chevalerie :

    • 1  Guillaume de Lorris et Jean de Meun, Le Roman de la Rose, éd. F. Lecoy, Paris, Champion, (...)

    N'est pas proece de mesdire ;
    A Keu le senechal te mire,
    Qui jadis par son moqueïz
    Fu mal renomez et haïz.
    Tant con Gauvains, li bien apris,
    Par sa cortoisie ot de pris,
    Autretant ot de blasme Keus,
    Por ce qu'i fu fel et crueus,
    Remponieres et mal paliers
    Desor toz autres chevaliers.1

    2Dans un tel contexte, l'évocation de ces deux célèbres personnages de l'univers arthurien peut apparaître surprenante. Pourtant les noms de Keu et de Gauvain jouent pleinement leur rôle d'exemples, à la fois au sens rhétorique du terme, dans la mesure où l'illustration qu'ils offrent aux propos du dieu Amour vient renforcer leur force persuasive, et au sens didactique, puisqu'ils sont aussi proposés au narrateur comme modèles à suivre. Nul n'est besoin d'en référer à un roman particulier ou à l'un de ses épisodes : ces deux personnages semblent suffisamment connus pour que la seule mention de leur nom, accompagnée d'une courte glose, confère à ces exemples toute leur efficace rhétorique et didactique.

    3A peine apparus dans le paysage littéraire, d’ores et déjà célèbres et dignes d'être offerts en exemples, ces héros chevaleresques, et d'autres encore, sont promis à une longue postérité dont témoignent non seulement les innombrables romans qui leur sont consacrés, mais aussi leur présence dans un contexte moins attendu, celui de la poésie, qu'il s'agisse des chansons de troubadours et de trouvères ou, au XIVe siècle, des dits narratifs de Guillaume de Machaut ou de Jean Froissart. En effet, chez ce dernier surtout, citer des noms de chevaliers est un réflexe particulièrement fréquent, caractéristique de son écriture poétique, que l’on retrouve aussi bien dans des dits relativement brefs comme Le Paradis d'Amour ou Le Dit dou bleu Chevalier que dans le triptyque formé par L'Espinette amoureuse, La Prison amoureuse et Le Joli Buisson de Jonece. Aussi nous apparaît-il légitime de nous interroger sur les raisons de ces références réitérées à l'univers chevaleresque, que ne suffisent certainement pas à expliquer les liens privilégiés du futur chroniqueur avec le monde aristocratique de son temps, dans des textes qui en sont a priori fort éloignés. La question est d'abord de savoir quel peut être le rôle, dans une œuvre poétique, de ces exemples empruntés à l'univers romanesque, aussi bien dans le contexte immédiat où ils apparaissent que dans l'économie générale du dit. Mais à travers cette question, c'est aussi celle du roman que nous aborderons, eu égard en particulier à sa réception, tant par le public aristocratique visé par les œuvres de Froissart que par le poète lui-même qui, ne l’oublions pas, est aussi l’auteur d’un roman, Meliador.

    4Avant tout il importe de rappeler que les exemples utilisés par Froissart dans son œuvre poétique, à l'instar de Guillaume de Lorris dans son Roman de la Rose, ne ressortent pas seulement du domaine romanesque, mais aussi, et même plus volontiers, du domaine mythologique, ces deux domaines se trouvant parfois mis conjointement à contribution. A première vue ces exemples ne sont pas différenciés, dans la mesure où ils participent tous de la dimension rhétorique et didactique du texte, dont ils permettent le plus souvent d'illustrer quelque lieu commun sur l'amour. Qu'ils renvoient à la mythologie ou au roman de chevalerie, la plupart des noms cités, des personnages évoqués ont, en correspondance plus ou moins étroite avec le contexte dans lequel ils se trouvent insérés, une fonction peu ou prou similaire, être une figure exemplaire de l’amour courtois. Ainsi, dans Le Joli Buisson de Jonece, Désir énumère une longue suite de personnages

    • 2  Jean Froissart, Le Joli Buisson de Jonece, éd. A. Fourrier, Genève, Droz, 1975, vv. 3147-3150.

    [...] qui furent si fet,
    Si pris, si ataint et si ars
    Que hardemens, advis ne ars
    Ne les en peurent aidier onques.2

    5Parmi eux on trouve aussi bien Narcisse et Écho, Achille et Polixène que Tristan, et même Ovide, Virgile et Aristote. Innombrables sont les victimes de l’amour, qui se comptent aussi bien au nombre des héros mythologiques que des chevaliers, des poètes ou des philosophes. A tel point qu’on peut se demander si les personnages cités et l’histoire qui leur est liée ont tellement d’importance, et si toute figure un tant soit peu célèbre n’est pas à même d’être un parangon d’amant courtois. Cette manière d’indifférence à la personne dont il s’agit est notamment perceptible dans La Prison amoureuse, quand Rose fait parvenir une lettre à Flos pour lui demander d’écrire

    • 3  Jean Froissart, La Prison amoureuse, éd. A. Fourrier, Paris, Klincksieck, 1974, p. 82, lettre (...)

    un petit dittié amoureus, qui se traitast sus aucune nouvelle matere qu’on n’aroit onques veü ne oÿ mise en rime, tele com, par figure, fu jadis de Piramus et de Tysbé, ou de Eneas et de Dido, ou de Tristran et de Yseus.3

    6On ne manquera pas de remarquer que tous les noms cités renvoient directement ou indirectement à l’univers romanesque, et instaurent ainsi un lien, sur lequel nous aurons d’ailleurs à revenir, entre la poésie narrative, le « dittié », et le roman, mais plus encore créent une indéniable équivalence entre personnage mythologique et chevalier.

    7Pourtant, si l'on envisage l'ensemble des noms de héros cités par Froissart dans ses dits, une différence essentielle apparaît rapidement entre référence romanesque et mythologique. Contrairement à cette dernière, qui peut donner lieu à un récit relativement développé, la référence romanesque reste en effet essentiellement allusive, exception faite d'une courte glose qui vient parfois expliciter la portée exacte de l'exemple. C'est notamment le cas dans le passage suivant de L'Espinette amoureuse  :

    • 4  Jean Froissart, L’Espinette amoureuse, éd. A. Fourrier, Paris, Klincksieck, 1972, vv. 2308-231(...)

    Lanscelos, Tristrans, Lyonniel,
    Porrus, le Baudrain Cassiiel,
    Paris et tamaint damoisiel
    N'ont pas esté
    Amé pour seul dire : « Il m'est biel,
    Dame, qu'or prendés ce capiel
    Et me donnés sans nul rapiel
    Vostre amisté. »
    Nennil, ains en ont bien livré
    A grant martire leur santé ;
    Et maint y ont, ains qu'iestre amé,
    Laissiet le piel.4

    8La référence romanesque apparaît ici sous les espèces d'une liste, d'une énumération plus ou moins longue de noms dont la seule mention paraît suffisante, sans qu'il soit nécessaire d'y adjoindre le récit de tel ou tel épisode romanesque. Même si ce n’est pas particulièrement sensible ici, en multipliant de telles listes de noms, Froissart joue d’une esthétique de l’accumulation liée à une conception de l’amour comme sentiment universel. Cela ne va pas d'ailleurs sans une certaine confusion, puisque sont cités pêle-mêle Lancelot et Tristan, héros qu'on ne présente plus, Porus et Cassiel, chevaliers apparaissant dans Les Vœux du Paon de Jacques de Longuyon, et enfin Pâris, personnage a priori plus mythologique que romanesque et dont la présence s'explique peut-être ici par le fait qu'il est au Moyen Âge au moins autant le héros du Roman de Troie de Benoît de Sainte-Maure qu'une figure mythique. Cette confusion, en fait toute relative, permet de mettre en évidence un autre aspect caractéristique de la référence romanesque : l'exemple renvoie bien plus à une catégorie d'individus constituant autant de variations autour d'un même type qu'à un individu particulier. Cet aspect est d'ailleurs confirmé par la glose à valeur généralisante qui explicite l'exemple. Tous ces chevaliers sont cités au même titre, celui d'avoir souffert le « grant martire » de l'amour. Peu importe, semble-t-il, qu'il s'agisse de Lancelot ou de Lionel, de tel ou tel chevalier, car l'exemple invoqué est ici une figure idéale et unique de chevalier et d'amant, non un personnage particulier.

    9A chaque fois, la référence chevaleresque se retrouve signalée par des traits stylistiques similaires : une énumération de noms qui se suffisent à eux-mêmes, parfois accompagnée d'une brève glose explicative. Comme le montre le passage suivant, emprunté à la longue liste de « figures et exemples » déroulée par Désir au narrateur du Joli Buisson de Jonece, la mention d'un chevalier ne donne jamais lieu au récit de tel ou tel épisode de son histoire personnelle, l'auteur se contentant au mieux d'y renvoyer de la façon la plus imprécise, comme s'il s'agissait d'un savoir partagé par tout un chacun :

    • 5  Le Joli Buisson de Jonece, vv. 3360-3365.

    Tristrans ossi sus tele fourme,
    Si com sa vie nous enfourme,
    Qui bien justement l'examine,
    Dou feu d'amour qui maint coer mine
    Telement fu examinés
    Que jusques en le fin menés.5

    On remarquera que dans la même longue liste d'exemples, l'histoire de Narcisse et Écho, celle de Pâris et Hélène, que l'on pourrait à bon droit supposer bien connues, n'en donnent pas moins lieu à un rapide récit en rappelle les moments importants. A l'inverse, tout en proposant de considérer avec quelque attention la « vie » de Tristan, Froissart n'en évoque pas le plus petit épisode, alors qu'ils ne sont pas nécessairement tous aussi représentatifs les uns que les autres du « feu d'amour » qui dévorait le cœur du chevalier.

    • 6  D. Kelly, « Les inventions ovidiennes de Froissart : réflexions intertextuelles comme (...)
    • 7  Voir par exemple N. Bradley-Cromey, « Mythological typology in Froissart’s Espinette amoureuse(...)
    • 8  Voir notamment K. Brownlee, « Ovide et le moi poétique « moderne » à la fin du Moyen Âge(...)

    Si nous avons insisté sur cette absence de tout récit développé accompagnant la référence romanesque, c'est que nous touchons là une différence essentielle qui la distingue de la référence mythologique. En effet par opposition au caractère uniquement allusif de la première, on relèvera le caractère volontiers narratif ou explicatif de la seconde. Non pas que chaque nom cité donne lieu à un développement narratif, en particulier lorsque sont en cause des personnages aussi connus que Narcisse ou Hector, à condition toutefois qu'il ne s'agisse pas d'une version plus ou moins modifiée de leur histoire. Néanmoins il n’est pas rare que la place consacrée à tel ou tel récit soit relativement importante, ainsi dans L’Espinette amoureuse où plus de deux cent vers sont dévolus à l'histoire d'Apollon et de Daphné, ou dans La Prison amoureuse, qui en consacre un peu moins de sept cent à celle de Pynoteüs et Neptisphelé. Il n'est pas difficile d'imaginer que de tels contes sont bien plus que des digressions à caractère ornemental, et de fait leurs fonctions, telles que la critique a pu les dégager, sont multiples. La question ayant déjà été amplement traitée, nous nous contenterons de quelques remarques intéressant notre propos. Qu'il s'agisse de la restitution plus ou moins fidèle d'un épisode ovidien des Métamorphoses ou d'une histoire créée de toutes pièces par Froissart, de tels contes laissent une large part à l’invention, au pouvoir créateur du poète. C’est dire, comme le précise D. Kelly, que l’intention de l’auteur est déterminante, puisque la matière « est adaptée à l’intention, et pas l’intention à la matière »6. Ces récits, dans la mesure où ils sont relativement développés, offent donc un appel constant à l’interprétation, aussi bien au niveau de la structure narrative du dit, grâce à de multiples effets d’écho et de mise en abyme7, qu’au niveau métadiscursif, dans la mesure où ils apparaissent fréquemment comme des mises en scène de l’activité poétique8.

    10Parce qu'ils sont suffisamment développés pour acquérir une certaine autonomie, qui ne fait d'ailleurs que renforcer leur rôle dans l'économie de l'œuvre, suffisamment complexes pour requérir une ou plusieurs interprétations, volontiers métadiscursives, seul le récit auquel donne lieu la référence mythologique est garant de la signification que l'on peut lui prêter. Elle doit avant tout sa valeur d'exemple à l'extension narrative qui l'accompagne, où le nom des personnages n'a somme toute que peu d'importance, puisque seule est porteuse de sens la série d'événements constituant leur histoire. Par contre le principe de fonctionnement de la référence romanesque est exactement inverse, puisque l'exemple est tout entier dans le nom de tel ou tel chevalier, non dans l'évocation d'un épisode précis de son histoire.

    • 9  L'Espinette amoureuse, v. 2672.

    11Cette différence majeure étant posée, reste maintenant à essayer d’en proposer une explication. Nous croyons pouvoir le faire en distinguant les deux univers de référence auxquels renvoient respectivement la référence romanesque et la référence mythologique, en fonction du degré de connaissance que peut en avoir le public d’abord aristocratique, et non clérical, visé par les œuvres poétiques de Froissart. D'un côté se trouve un univers de référence relativement savant constitué par la mythologie, les différents récits issus des Métamorphoses d'Ovide et d'autres ouvrages latins, ou des versions en langue vernaculaire telles qu'ont pu partiellement les rendre accessibles les romans antiques, Le Roman de la Rose et plus encore l’Ovide moralisé. De l'autre l'univers de référence du roman de chevalerie, que l'on peut supposer connu d'un public beaucoup plus large et donc beaucoup moins savant que le premier. A défaut d'une étude précise de la réception de ces différents textes, difficilement envisageable, on relèvera quelques indices qui peuvent faire de cette distinction plus qu'un postulat hasardeux. En ce qui concerne le conte mythologique d'abord, remarquons que Froissart n'hésite pas à attribuer à Ovide, de la façon la plus fantaisiste, telle ou telle de ses inventions. Il prétend raconter l'histoire de Papirus et Ydorée « Ensi qu'Ovides le devise »9 et, bien plus, pour assurer la véracité de celle de Pynoteüs et de Neptisphelé, va jusqu'à affirmer :

    • 10  La Prison amoureuse, vv. 1990-1995.

    Car pour otel je le vous livre
    Qu'Ovides le met en son livre,
    Qui fu sages et grans assés,
    Et croi qu'il n'euïst ja passés
    Tel recors ne mis en memore,
    Se vraie ne tenist l'ystore.10

    12Comment un tel respect affiché pour Ovide peut-il aller de pair avec un usage apparemment aussi inconséquent de l'autorité qu'il est sensé représenter? On pourra certes dire que c'est précisément la légèreté de l'attribution qui justifie un éloge plutôt appuyé du poète. Mais peut-être un tel passage appelle-t-il une double lecture? Pour un public relativement savant, qui connaît effectivement l'œuvre d'Ovide, cette attribution fantaisiste pourra passer pour une plaisanterie de Froissart. Par contre, pour un public à la culture moins étendue, qui ne connaît peut-être d'Ovide que le nom, elle sera bel et bien garante de la véracité et de la valeur du conte. Par ce jeu souvent répété de l’attribution douteuse, le texte souligne lui-même la réception ambivalente qu’il suppose et les multiples interprétations auxquelles il peut être soumis, selon la culture de son lecteur, ne serait-ce que dans sa capacité à faire la part de ce qui est dû à Ovide et de ce qui est dû à Froissart.

    13Quels sont à l'inverse les éléments qui peuvent nous prouver que l'univers de référence romanesque est beaucoup mieux connu du public de Froissart? C'est que, comme l'affirme Philosophie au narrateur du Joli Buisson de Jonece, les exploits des héros de romans sont dans toutes les mémoires, grâce aux multiples textes qui en conservent la trace écrite :

    • 11  Le Joli Buisson de Jonece, vv. 405-413.

    Que sceuïst on qui fu Gauwains,
    Tristrans, Perchevaus et Yeuwains,
    Guirons, Galehaus, Lanscelos,
    Li rois Artus et li rois Los,
    Se ce ne fuissent li registre
    Qui yauls et leurs fes aministre?
    Et ossi li aministreur
    Qui en ont esté registreur
    En font moult a recommender.11

    14A quel degré de notoriété sont parvenus les chevaliers cités, la suite du texte permet de s'en faire une idée, évoquant les « docteurs et euvangelistes » qui ont également été « registreur » des faits qui ont marqué l'avènement de la foi chrétienne. La vulgate arthurienne, celle du Lancelot en prose ou du Tristan en prose par exemple, à laquelle Froissart pourrait penser ici, se trouve implicitement comparée à une autre vulgate, dont il est inutile de souligner l'importance au Moyen Âge, celle de la « Sainte Escripture ».

    15Précisons toutefois qu'il ne s'agit pas de n'importe quels héros romanesques. Si l'on peut considérer que tous évoquent quelque image dans l'esprit du public de Froissart, c'est aussi que ce dernier limite le plus souvent son choix d'exemples aux personnages les plus connus. Ainsi, parmi l'ensemble des références citées dans son oeuvre poétique, le nom de Tristan, étant donné qu'on le trouve mentionné à chaque fois, arrive assez largement en tête, avec dix occurrences, sans compter celles de la poésie lyrique, suivi par ceux de Lancelot, Gauvain ou encore Perceval. A l'inverse, certains chevaliers ne sont évoqués qu'une seule fois, ainsi les héros des Vœux du Paon mentionnés dans L'Espinette amoureuse, ou encore Drumart et Mordred dans une longue liste du Paradis d'Amour.

    16Il est donc des chevaliers beaucoup plus célèbres que d'autres, et l'on ne sera pas surpris de les voir réapparaître dans un tout autre contexte, romanesque cette fois, qui fournit une nouvelle illustration, un peu différente, de leur notoriété et de la fonction littéraire qu’elle peut avoir. On trouve en effet dans le prologue de Meliador, au moment où Froissart pose le cadre de son récit, une assez longue énumération de chevaliers :

    • 12  Jean Froissart, Meliador, éd. A. Longnon, Paris, S.A.T.F., 1895-1899, vv. 28-41. On trouve une (...)

    Environ ou .IX. ans ou .X.,
    Avant que li preus Lanselos,
    Melyadus, ne li rois Los,
    Guiron, Tristrans ne Galehaus,
    Gauwains, Yewains, ne Perchevaus,
    Ne chil de la Table Reonde
    Fuissent cogneü en ce monde,
    Ne que de Merlin on euist
    Cognissance, ne c'on seuist
    Nulle riens de ses prophesies,
    Plusieurs belles chevaleries
    Avinrent en la Grant Bretaigne,
    Si com cilz livres nous ensengne,
    Lequel ensiewant je dirai.12

    • 13  Voir en particulier à ce sujet l'article de F. Bouchet, « Froissart et la matière de (...)

    17Si Froissart énumère ainsi dans le prologue de son roman les grands noms de la littérature arthurienne, c'est d'abord pour en faire des points de repère, pour situer les aventures de ses personnages, encore anonymes, dans la sphère d'attraction de héros connus de tous, ce qui est aussi une façon de laisser à son invention romanesque le plus de liberté possible. En effet Tristan, Gauvain ou Lancelot n’apparaissent pas tant ici comme les acteurs ou les futurs acteurs des « belles chevaleries » évoquées, que comme des célébrités littéraires à l’aune desquelles le lecteur pourra les juger. Tout en soulignant la nature fondamentalement intertextuelle de son écriture, Froissart laisse également percevoir la réception qu'il en attend. Faire de Lancelot ou de Gauvain des points de repère littéraires, c'est aussi présupposer chez son public une connaissance suffisante de la littérature arthurienne qui lui permettra de goûter au mieux les multiples jeux de détournement et de parodie auxquels il soumet la tradition romanesque.13

    • 14  S. Huot, art. cit., p. 243.

    18Il apparaît donc légitime en fin de compte de supposer une réception différenciée des exemples utilisés par Froissart, selon qu'ils appartiennent à un univers de référence, celui de la mythologie, dont la connaissance implique un certain savoir, et notamment la connaissance du latin, qui n'est pas donné à tous, ou à un univers de référence largement plus diffusé et donc beaucoup mieux connu, celui des romans de chevalerie. Précisons toutefois que la ligne de partage entre ces deux univers de référence n’est pas d’une netteté telle que le nécessite la clarté de la démonstration, et surtout qu’elle ne se fonde pas sur une opposition entre langue romane et latin, puisque l’Ovide moralisé rend accessibles les mythes utilisés par Froissart à son public aristocratique qui sait aussi manifester, comme le souligne S. Huot, «  an interest in literary interpretation, in mythology and mythography, in metaphor and allegory »14.

    19Tout oppose en somme le héros mythologique et le héros romanesque. Alors que le premier est le vecteur d'une seule et unique histoire, même si elle peut parfois se trouver assez considérablement modifiée, autour du second s'agrègent une multitude de récits qui en composent une image à la fois beaucoup plus floue et, paradoxalement, beaucoup moins soumise à variations. De Tristan, de Lancelot ou de Perceval, malgré le nombre de romans qui leur sont consacrés, chacun peut prétendre avoir une connaissance relativement approfondie, une représentation relativement élaborée. Et c'est précisément à cette représentation, trop complexe pour y renvoyer autrement qu’allusivement, que l'exemple romanesque doit faire appel, représentation qui appartient à un univers de référence connu de tout un chacun, en fonction bien sûr de son expérience personnelle de lecture. Voilà qui explique en dernier ressort une sorte de paradoxe dans l'usage que fait Froissart de la mythologie et de l'autorité ovidienne. On pouvait s'étonner en effet de le voir manipuler, modifier et déformer des récits tout auréolés du prestige de l'Antiquité et par là de l'extrême malléabilité de la matière mythologique. Mais ce paradoxe n'est qu'apparent, dans la mesure où ce travail de manipulation est très certainement rendu possible par une relative méconnaissance du public et qu’a contrario il ne serait guère envisageable à l'égard de héros dont les aventures ont été largement diffusées par le roman de chevalerie.

    20D'une certaine manière, la notoriété des héros romanesques leur porte ombrage. Bien connus du public, leur image n'en reste pas moins extrêmement vague et imprécise et ne peut en aucune façon en faire les riches vecteurs de sens que sont les personnages mythologiques. Aussi la portée des exemples romanesques, explicitée par la glose qui les accompagne, est-elle toujours relativement limitée, illustrant tel ou tel lieu commun de l'amour courtois. Dans L'Espinette amoureuse la dame figure ainsi son cœur lié par l'amour

    • 15  L'Espinette amoureuse, vv. 2767-2770.

    […] d'ossi drois neus
    Que pour Tristran en fu la belle Yseus
    Et Genevre pour Lanscelot le preus,
    Et tout aultre, non pas seul de ces deus.15

    21Comme dans cet exemple, l'usage que fait Froissart de la référence romanesque est le plus souvent purement ornemental, dans la mesure où la fonction du nom se limite à celle de comparant dans une comparaison à valeur hyperbolique. Cet usage, de loin le plus fréquent dans l'oeuvre de Froissart, n'est cependant pas le plus caractéristique, dans la mesure où on le rencontre également assez souvent dans d'autres oeuvres médiévales, lyriques ou narratives.

    22Mais par opposition à cet usage exclusivement poétique ou rhétorique de l'exemple chevaleresque, il est possible de définir une utilisation plus spécifiquement didactique, qui fait du personnage évoqué un véritable modèle à suivre, de même que Gauvain peut l’être dans le passage du Roman de la Rose cité au début de cette étude. Il ne s'agit plus cette fois d'illustrer de façon très générale une représentation topique de l'amour courtois, mais de citer en exemple tel ou tel comportement précis. Ainsi dans Le Dit dou Bleu Chevalier le narrateur développe longuement l'exemple suivant, destiné à faire changer d'attitude le chevalier qu'il a rencontré, désespéré d’être séparé de la femme qu’il aime :

    Vous savés bien que maint bon chevalier
    Ont bien amé dou temps ça en arrier :
    Je prenc Tristran pour Yseut le premier
    Et en après
    Yewain le preu pour la belle Alydés
    Et Lanscelot qui tant fu bons et nes :
    Qui bien regarde la matere et les fes
    Seul de ces trois,
    Et de Guiron aussi le tres courtois,
    Et dou vaillant Perceval le Gallois
    Et de pluisours des quels je me tais cois,
    Certainnement
    En leurs vies trouvera plainnement
    Que par amours amerent loyalment
    Et doubloient en euls leur hardement
    Par bien penser
    A leurs dames de coer et de penser ;
    Et nequedent ne pooient ester
    Trop longement dalés elles, c'est cler,
    Et toutes fois
    De loyauté tenoient les esplois,
    Non obstant que dedens .II. ans ou .III.
    Ne veoient elles ne leurs arrois ;
    Et au retour,
    Quant li vaillant avoient fait leur tour,
    On ne parloit mies dou lonc sejour,
    Mes on disoit : « Vous venés a bon jour » ;
    Et tout ensi
    De leurs dames estoient conjoÿ :

    • 16  Jean Froissart, « Dits » et « Débats », éd. A. Fourrier, Genève, Droz, 1979, Le Dit (...)

    Lors se doubloit li amours, je vous di.16

    • 17  Voir M. Stanesco, « Sous le masque de Lancelot. Du comportement romanesque au Moyen Âge », Po(...)

    23Comme le montrent les multiples circonlocutions et détours du discours, la référence romanesque joue ici un rôle très précis, même si encore une fois il n'est pas question de l'histoire personnelle des héros cités mais d'un développement à valeur généralisante décrivant le comportement propre à tout chevalier de roman : l'éloignement et l'absence, prétextes à la multiplication des exploits, ne sont pas une menace qui pèse sur l'amour, mais au contraire un moyen de le renforcer. On remarque toutefois que le narrateur présente cette lecture somme toute traditionnelle de l’attitude chevaleresque, de façon suffisamment biaisée pour qu'elle puisse s'adapter à la situation particulière du Bleu Chevalier, qui apparaît comme un personnage chargé d’une certaine expérience, désabusé, désespéré même, et qui se trouve, semble-t-il, retenu prisonnier. La référence romanesque, bien loin de n'avoir qu'un rôle ornemental, sert effectivement à proposer un modèle à suivre au Bleu Chevalier, qui lui permette de garder l’espoir. Le discours que tient le narrateur est donc une véritable incitation à adopter un « comportement romanesque » et à retrouver une attitude propre à l'aristocratie chevaleresque au Moyen Âge, attitude particulièrement fréquente à l'époque de Froissart, et dont ses Chroniques se font d'ailleurs l'écho, qui laisse apparaître la vie de nombreux chevaliers réels comme une véritable imitation de la littérature17. On trouve ainsi un exemple caractéristique de cette attitude dans la biographie consacrée au Maréchal Boucicaut, texte anonyme du début du XVe siècle. Tout jeune encore, le chevalier qu'est alors Boucicaut n'en doit pas moins se dévouer à l'amour de quelque dame, ce que l'auteur justifie ainsi :

    • 18  Le Livre des fais du bon messire Jehan le Maingre, dit Bouciquaut, mareschal de France et (...)

    Amours oste paour et donne hardement, fait oublier toute peine et prendre en gré tout le traveil que on porte pour la chose amee. Et qu'il soit vray, qui veult lire les histoires des vaillans trespassez, assez trouvera de ce preuve, si comme on lit de Lancelot, de Tristan et de plusieurs autres que Amours fist bons et a renommee attaindre  ; et mesmement en noz vivans assez de nobles hommes de France et d'autre part en veons et avons veu, si comme on dit de messire Othe de Gransson, du bon connestable de Sensarre et d'autres assez […]18

    24Comme tout jeune chevalier qui se respecte, Boucicaut sacrifie à l'amour, donc, d'une certaine manière, non seulement à la lecture des « histoires » des glorieux héros qui l'ont précédé dans la carrière des armes, mais aussi à leur imitation. Par contre, comme le montre sa réponse, le Bleu Chevalier, bien peu convaincu par la démonstration du narrateur, ne voit pas en Tristan ou Lancelot des modèles sur lesquels calquer sa conduite :

    • 19  Le Dit dou Bleu Chevalier, vv. 331-346.

    […] Amis, vous n'avés nullement
    Solu vos mos,
    Car se Tristrans, Yewains et Lanscelos
    Et cil qui ont eü d'amours maint los
    Faisoient ce, tels estoit leur pourpos
    Qu'il le faisoient
    Tant pour l'amour que aux dames avoient
    Que pour honnour acquerre, ou il tendoient,
    Et ensi les aventures cerchoient
    En tous pays.
    Mes je ne sui noient de ceuls, amis,
    Car nulle part ne vois, dont je vail pis,
    Et s'en serai par droit mains conjoïs,
    A mon retour,
    De celle a qui j'ai mis coer et amour.
    Ci sui enclos com dedens une tour.19

    • 20  Voir Chrétien de Troyes, Le Chevalier de la Charete, éd. M. Roques, Paris, Champion, 1958, vv. (...)

    25Il est évidemment paradoxal de prétendre n'avoir rien de commun avec les chevaliers de roman tout en se décrivant « enclos com dedens une tour », situation que Lancelot est le premier à avoir bien connue quand il s'est trouvé retenu prisonnier par Méléagant20. En fait ce n'est pas que le Bleu Chevalier refuse toute valeur exemplaire à des êtres de fiction, qui ne sont d'ailleurs pas présentés comme tels, mais il conteste l'opportunité de l'exemple. Même si elle s'oppose à la folie du chevalier, qui se manifeste au début du dit par l'alternance antithétique de la joie et de la tristesse, la raison du clerc, accompagnée de sa connaissance des exemples du passé, s'avère donc insuffisante ou inadaptée pour le réconforter. Pourtant le chevalier ne dénie pas au clerc toute capacité à l'aider, non en faisant appel à sa connaissance d’une littérature romanesque déjà existante, mais en ayant recours à sa compétence d'écriture pour « ordonner .I. dittier » qui raconte

    Com d'aventure avés, et sans cerchier,
    Dedens ce bois trouvé un chevalier
    De bleu vesti.

    • 21  Voir D. Rieger, « Eslongié m'an de quanque j'amoie  : chevalier, clerc et vérité (...)

    26Ce n'est donc pas la valeur exemplaire de la littérature qui est remise en cause, mais les modèles de comportement qu'elle peut proposer qui, dans le cas du Bleu Chevalier, ne correspondent guère à sa situation. Il ne lui reste donc plus qu'à se poser lui-même en exemple, à se constituer en personnage littéraire, opération qui ne peut être effectuée sans le secours du clerc narrateur. Non que cela fasse Le Dit dou Bleu Chevalier plus proche d'une quelconque réalité contemporaine, mais seulement est ainsi rendue manifeste la nécessité d'un renouvellement des figures et des modèles littéraires21.

    27Crise du modèle chevaleresque? Sentiment d'une rupture entre la littérature romanesque traditionnelle et la réalité, alors qu'elles ne cessent justement de s'inspirer l'une de l'autre? Si un tel phénomène semble bien être à l'oeuvre dans Le Dit dou Bleu Chevalier, il n'en est pas de même dans un poème comme L'Espinette amoureuse, où au contraire le narrateur manifeste clairement la fascination que le modèle chevaleresque a exercée sur lui, et ce dès son plus jeune âge :

    • 22  L'Espinette amoureuse, vv. 23-34.

    En mont jouvent tous tels estoie
    Que trop volentiers m'esbatoie,
    Et, tels que fui, encor le sui.
    Mais che qui fu hier n'est pas hui.
    Tres que n'avoie que .XII. ans,
    Estoie forment goulousans
    De veoir danses et caroles,
    D'oïr menestrels et paroles
    Qui s'apertiennent a deduit,
    Et se m'a Nature introduit
    Que d'amer par amours tous chiaus
    Qui aimment et chiens et oisiaus.22

    28Rien de plus profondément ancré dans le comportement du narrateur que ce goût pour les divertissements chevaleresques et ceux qui les pratiquent, puisque c'est Nature elle-même qui l'en a pourvu. Aussi n'est-ce guère surprenant si on le voit, quand il n'est encore qu'un enfant, jouer au chevalier :

    • 23  Ibid., vv. 213-218.

    Et s'ai souvent d'un bastonciel
    Fait un cheval nommé Grisiel,
    Et ossi souvent fait avons
    Hïaumes de nos caperons,
    Et moult souvent devant les filles
    Nos batïons de nos kokilles.23

    29Parmi une multitude d'autres jeux, cette activité prend un sens particulier dans la mesure où elle n'est pas seulement ludique, si l'on en croit l'exemple de Boucicaut qui, dans son enfance, s'adonne au même genre d'amusements :

    • 24  Le Livre des fais, p. 17.

    […] aux enfans faisoit bacinés de leur chapperons, et en guise de routes de gens d'armes, chevauchant les bastons et armez d'escorces de buches, les menoit gaigner quelque place les uns contre les autres.24

    • 25  Ibid., p. 16.

    30Pour le futur chevalier, de telles pratiques apparaissent comme le signe indubitable d'une vocation, ce que laisse bien entendre l'auteur en précisant que « ses gieux enfantelins estoient communement de choses qui peuent signiffier fais de chevalerie »25. Mais chez le narrateur de L'Espinette amoureuse, que rien ne destine à une telle carrière, elles soulignent plutôt l'influence exercée par ses lectures sur un enfant qui non content d'être un grand joueur est aussi un grand dévoreur de « rommans » :

    • 26  L'Espinette amoureuse, vv. 309-321.

    Et quant li temps venoit divers
    Qui nous est appellés yvers,
    Qu'il faisoit lait et plouvieus,
    Par quoi je ne fuisse anoieus,
    A mon quois, pour esbas eslire,
    Ne vosisse que rommans lire.
    Especiaument les traitiers
    D'amours lisoie volentiers,
    Car je concevoie en lisant
    Toute cose qui m'iert plaisant ;
    Et ce en mon commencement
    Me donna grant avancement
    De moi ens es biens d'amours traire.26

    31L’Espinette amoureuse nous propose ici une intéressante mise en scène de la réception du roman au XIVe siècle : non seulement la lecture est un « esbas », une distraction, mais elle a aussi une portée didactique car elle permet au jeune lecteur de faire ses premiers pas dans le domaine amoureux. L'influence du roman est cependant plus profonde encore :

    • 27  Ibid., vv. 325-328.

    Mais plaisance nee en jouvent
    Encline a ce le coer souvent
    Et li donne la vraie fourme
    Sus la quele son vivant fourme.27

    32Le modèle chevaleresque qui s'impose au narrateur a donc une origine exclusivement littéraire, et la littérature apparaît ici comme le modèle, la « vraie fourme » de la vie.

    33Deux remarques s'imposent toutefois, qui préciseront la portée de cette influence. Au moment où le narrateur fait ces lectures, il va encore

    • 28  Ibid., vv. 35-36.

    [...] a l’escole
    Ou les ignorans on escole.28

    • 29  Voir A. Planche, « Culture et contre-culture dans L’Espinette amoureuse de Jean Froissart : (...)
    • 30  Voir Antoine de la Sale, Jehan de Saintré, éd. J. Blanchard et trad. M. Quereuil, Paris, Le (...)

    34Il ne semble lui-même guère savant, en particulier en latin, dont le difficile apprentissage lui vaut d'être souvent battu. On peut donc considérer que la culture qui lui est accessible à cet âge, ainsi qu’aux autres personnages de L’Espinette amoureuse, se limite à des textes en langue vernaculaire29, en particulier des « rommans » de chevalerie, tel le Cleomadès d’Adenet le Roi, mentionné plus loin. Voilà qui confirme ce que nous disions à propos de l'univers de référence romanesque, qui apparaît de nouveau beaucoup mieux connu parce que beaucoup plus accessible, notamment à des lecteurs ignorant le latin. En outre, de même qu'une telle influence de la littérature ne peut être prêtée à n'importe quelle de ses productions, de même elle ne peut s'exercer sur n'importe qui. Si le narrateur, à l'inverse du Bleu Chevalier, que l'on peut supposer nettement plus âgé, se montre à ce point fasciné par ses modèles littéraires, c'est aussi parce qu'il est encore très jeune, comme le sont en général tous ceux à qui sont proposés de tels exemples, qu'il s'agisse de Boucicaut, ou encore de Jean de Saintré.30

    • 31  L’Espinette amoureuse, vv. 710-719.

    35Le fait est que pour les jeunes gens la littérature est la « vrai fourme » de la vie, lorsque le narrateur de L'Espinette amoureuse rencontre pour la première fois la demoiselle dont il va tomber amoureux, elle est précisément en train de lire un roman, Cleomadès, dont elle semble presque, étant donné le portrait qui est fait d'elle31, être une des héroïnes. La lecture, le roman sont donc au départ de l'histoire amoureuse qui va suivre, et peut-être aussi à l'origine du malentendu qui la rend possible, qui relèverait en fait d'une confusion entre littérature et réalité :

    36

    • 32  Ibid., vv. 737-739.

    Et quant elle ot lut une espasse,
    Elle me requist par sa grasse
    Que je vosisse un petit lire.32

    • 33  Ibid., v. 785.

    37« A vostre lire preng plaisir »33 affirme ensuite la jeune fille. Mais reste à savoir si le plaisir en question est dû à la personne du narrateur, ou à la lecture en elle-même. Ce malentendu initial pourrait bien suffire à expliquer les déboires futurs du héros, qui commencent dès qu'il décide de lui avouer son amour. En effet la demoiselle ne lit même pas la ballade que le héros lui fait parvenir : en fait seul le livre où elle se trouve glissée éveille son intérêt,

    • 34  Ibid., vv. 850-851.

    Car lires est uns douls mestiers,
    Quiconques le fait par plaisance.34

    • 35  Le terme apparaît au vers 2153.
    • 36  Voir l'article de M. Stanesco, « ‘D'armes et d'amours’ : la fortune d'une d(...)

    38Ainsi le début de L'Espinette amoureuse est tout entier marqué par la littérature, une littérature qui engendre la littérature, puisque la lecture des « traitiers d'amours » suscite dans l'esprit du narrateur un songe qui répète le jugement de Pâris, et celle des romans de chevalerie est à l'origine d'une succession d'aventures constituant une véritable « queste »35 poétique et amoureuse. L'Espinette amoureuse doit beaucoup à des modèles romanesques dont elle met en scène l'influence sur sa propre structure, et ce dès le prologue, où se trouve inscrite cette devise caractéristique du roman36 :

    • 37  L'Espinette amoureuse, vv. 52-54.

    Car en pluiseurs lieus on decline
    Que toute joie et toute honnours
    Viennent et d'armes et d'amours.37

    • 38  R. Morris, « Machaut, Froissart and the fictionalization of the self », The Modern Language (...)

    39Ce qui est modèle comportemental pour le personnage devient aussi modèle scriptural pour le poète, qui compose son dit comme un roman de chevalerie. C’est pourquoi, comme le constate R. Morris, dans la mesure où de telles oeuvres apparaissent comme des « fictional constructs », « it is possible to seek the basis of their structure in an underlying, pre-existent fictional construct which customarily presented itself as (historical) truth : the Arthurian romance »38. De même que la référence mythologique, lorsqu’elle prend la forme d’un récit relativement développé, manifeste une fonction structurante dans L’Espinette amoureuse, de même la référence chevaleresque accède au statut de mythe, non seulement au regard du héros, puisqu’elle structure son évolution personnelle, et en particulier son initiation amoureuse, mais aussi au regard du narrateur puisqu’elle structure également l’évolution narrative et la composition de son récit.

    • 39  J. Cerquiglini, « Un engin si soutil ». Guillaume de Machaut et l'écriture au XIV siècle(...)

    40La référence chevaleresque, de simple élément d’une figure rhétorique à valeur poétique ou didactique qu’elle était, se trouve en fin de compte exercer une influence bien plus profonde sur l'œuvre poétique de Froissart. Comme l'a montré J. Cerquiglini à propos de Guillaume de Machaut, dans certains de ses dits le poète « propose, à travers son propre personnage d'amant, la figure d'un clerc-chevalier, c'est-à-dire d'un clerc (quelqu'un n'appartenant pas à la classe aristocratique) qui se rêve chevalier »39. Mais l'imitation du modèle chevaleresque peut, chez Froissart, aller encore plus loin, jusqu'à une sorte d'identification entre poète et chevalier, dont on trouve notamment un exemple dans la première de ses « balades amoureuses » :

    • 40  Ballades et rondeaux, éd. R.S. Baudouin, Genève, Droz, 1978, p. 6, vv. 21-25.

    Ensement vifs en prison dolereuse,
    Ne nuls confors ne m’est representans ;
    S’en ai souvent l’entente peu joieuse,
    S’en affoiblist et muert en mi li sans.
    Non ai Amans et en sournoms Tristrans.40

    • 41  C’est ce que F. Rigolot, dans Le Texte de la Renaissance. Des Rhétoriqueurs à Montaigne, (...)

    41On assiste ici à une véritable assimilation, qui n’est plus une comparaison, entre le sujet de l'énonciation lyrique et la figure emblématique de Tristan, attitude d'ailleurs très comparable à celle des poètes de la Renaissance, qui feront de certains héros mythologiques de véritables doubles d'eux-mêmes41. Identifié au poète, le chevalier n'est plus seulement son modèle mais aussi son représentant ; élevé au même rang que le poète, il peut devenir comme lui un personnage à part entière dans les fictions poétiques de Froissart.

    42Ainsi, outre des figures chevaleresques plutôt atypiques comme celle du Bleu Chevalier, certains héros romanesques aussi célèbres que Lancelot ou Perceval accèdent au statut de personnages, même si c'est par le biais du songe allégorique, dans Le Paradis d'Amour. C'est en effet en parcourant ce lieu, au cours d'un rêve, que le narrateur aperçoit « en une lande »

    • 42  Jean Froissart, Le Paradis d'Amour. L'orloge amoureus, éd. P.F. Dembowski, Genève, (...)

    […] une compagne grande
    De dames et de damoiselles
    Friches et jolies et belles,
    Et grant fuison de damoisiaus
    Jolis, et amoureus et biaus.42

    43Parmi eux, apprend Plaisance au narrateur

    • 43  Ibid., pp. 63-64, vv. 974-990.

    Troïllus y est et Paris,
    Qui furent fil au roi Priant.
    Et cesti que tu vois riant,
    C'est Lanscelos tout pour certain.
    Et pour ce que forment je t'ain,
    Des aultres les noms te dirai,
    D'aucuns ja ne t'en mentirai :
    Il y sont Tristrans et Yseus,
    Drumas et Perchevaus li preus,
    Guirons et Los et Galehaus,
    Mordrés, Melyadus, Erbaus.
    Et chils a che biel Solel d'Or,
    On l'appelle Melyador,
    Tanghis et Camels de Camois
    Sont la ensus dedens ce bois,
    Agravains et Bruns et Yeuwains
    Et li bons chevaliers Gauwains.43

    44Vient ensuite la liste des dames formant couples avec tous ces chevaliers, qui sortent du domaine de la référence littéraire pour devenir de véritables personnages. En effet, si tous ces amants et amantes exemplaires font ici leur apparition, c'est qu'ils appartiennent à la vaste troupe des « veneour » du dieu Amour précédemment évoqués par Plaisance :

    • 44  Ibid., vv. 936-944.

    Il y a contes, dux et rois,
    Chevaliers et de toutes gens,
    Dont li arrois est biaus et gens.
    Car qui n'est de moult gentil estre,
    Il ne puet a mon signour estre
    Ne estre escrips en son registre.
    Et tous cheuls que je vous registre
    Sont en tous temps bon veneour
    Et cachent tout dis sans sejour.44

    45Il est vrai que toutes ces figures romanesques ne sont pas de véritables acteurs du récit, d'abord parce que leur activité ne trouve pas à se déploier ailleurs que dans le discours de Plaisance, mais surtout dans la mesure où le fait d'être « escrips » dans le « registre » d'Amour tend essentiellement à souligner leur origine littéraire. Il n'en reste pas moins que ces personnages se trouvent ainsi placés sur le même plan diégétique que le narrateur, ce qui fait de la poésie de Froissart un lieu de rencontre, de confrontation, mais surtout, comme ici, d'assimilation entre la figure du chevalier et celle du clerc.

    • 45  Ibid., p. 117.
    • 46  J.H.M. Taylor, « The fourteenth century : context, text and intertext », The Legacy of (...)

    46Bien sûr on aura tout de suite constaté à la lecture de cette liste que Froissart, non content de mêler héros mythologiques et chevaliers célèbres, y a inséré les noms de certains personnages de son propre roman, Meliador. Comme le note l'éditeur du Paradis d'Amour, P.F. Dembowski45, la rupture syntaxique qui accompagne la mention de Méliador, Tangis et Camel, et le fait également qu'aucun personnage féminin du roman ne soit évoqué à la fin de la liste, sont les indices d'une probable interpolation. Mais qu'il s'agisse d'un ajout ultérieur du poète lui-même ou d'une intervention de copiste, la présence de ces noms n'en est pas moins la preuve que les héros de Meliador sont considérés appartenir peu ou prou au même monde, au même univers de référence que Tristan et Perceval, ou plus précisément, qu’on voudrait les intégrer au même prestigieux passé littéraire. Il peut alors être tentant de comprendre le roman de Froissart à la lumière de cette commune appartenance, même seulement souhaitée, et d'y voir le résultat d'un usage non plus allusif, mais véritablement créateur de la référence chevaleresque, qui soumettrait la matière de Bretagne à un travail de réélaboration, fait de respect affiché et de modifications parfois profondes, identique à celui de la mythologie antique. Meliador est somme toute aussi arthurien que peut être ovidien le conte de Papirus et Ydorée ou celui de Pynoteüs et Neptisphelé. A de nombreux égards Meliador n'a rien d'un roman arthurien, dans la mesure surtout où Froissart n'y fait intervenir qu'un nombre très réduit de personnages appartenant à la tradition romanesque, se contentant, comme le note J.H.M. Taylor, d'une « minimal Arthurian mise en scène »46. Pourtant il met indéniablement en scène le mythe arthurien, en tant que mythe fondateur de la chevalerie, qu'il tend, par une série d'adaptations aux réalités du XIVe siècle, à mieux faire correspondre aux attentes de son public aristocratique, ainsi d’ailleurs qu’à ses propres attentes, en particulier en suggérant une étrange proximité entre la figure cléricale du narrateur et ses propres personnages.

    47D'un détail rhétorique, la citation d'un ou plusieurs noms appartenant à un univers de référence largement partagé, le roman de chevalerie, on en vient finalement à considérer une question engageant de façon beaucoup plus globale la poétique de Froissart, dans l'ensemble de son oeuvre, celle de l'écriture d'un roman, Meliador. Plutôt que de souligner les liens presque affectifs de Froissart avec le monde aristocratique du XIVe siècle, le recours réitéré à la référence chevaleresque révèle de multiples points de contact entre sa production poétique et romanesque. Non seulement, comme nous avons essayé de le montrer, certains dits de Froissart doivent beaucoup à des modèles romanesques, et la citation de noms de chevaliers célèbres n'en est que la manifestation à la fois la plus apparente et la moins essentielle. Mais il n'est pas moins vrai que Meliador ait une dette importante à l'égard des thèmes et des situations propres à la poésie narrative de Froissart. On a dit que dans sa poésie Froissart citait des noms de héros romanesques, mais dans son roman il cite les mêmes personnages mythologiques que dans sa poésie. Au moment de la mort de Camel, tué par Méliador à l’issue d’un duel acharné, sont ainsi évoqués quelques uns de ses illustres prédécesseurs :

    • 47  Meliador, vv. 9122-9133.

    Il ne fu mies seulz qui a
    Le mort rechut pour bien amer.
    Leander en morut en mer.
    Si fist Narcissus pour Equo,
    Tristrans, Priamus et Porro ;
    Et li rois Mennon, on me tonde
    S’il n’en fu mués en aronde.
    Si en morut Deucalyon
    Et Acilles, qui de renom
    Passoit tous aultres chevaliers.
    On en trouveroit .III. milliers
    Qui en sont mort, il n’est pas doute.47

    48La boucle est bouclée : il ne reste plus à Camel, mort par amour, qu’à rejoindre ses pairs dans Le Paradis d’Amour, en compagnie, bizarrement, de son assassin.

    Notes

    1 Guillaume de Lorris et Jean de Meun, Le Roman de la Rose, éd. F. Lecoy, Paris, Champion, 1965-1970, vv. 2077-2086. C'est la seule référence à l'univers romanesque dans toute la partie due à Guillaume de Lorris.
    2 Jean Froissart, Le Joli Buisson de Jonece, éd. A. Fourrier, Genève, Droz, 1975, vv. 3147-3150.
    3 Jean Froissart, La Prison amoureuse, éd. A. Fourrier, Paris, Klincksieck, 1974, p. 82, lettre V, l. 44-48.
    4 Jean Froissart, L’Espinette amoureuse, éd. A. Fourrier, Paris, Klincksieck, 1972, vv. 2308-2319.
    5 Le Joli Buisson de Jonece, vv. 3360-3365.
    6 D. Kelly, « Les inventions ovidiennes de Froissart : réflexions intertextuelles comme imagination », Littérature, 41, 1981, p. 90.
    7 Voir par exemple N. Bradley-Cromey, « Mythological typology in Froissart’s Espinette amoureuse », Res Publica Litterarum. Studies in the classical tradition, 3, 1980, pp. 207-221 et J.-L. Picherit, « Le rôle des éléments mythologiques dans Le Joli Buisson de Jonece de Jean Froissart », Neophilologus, 63, 1979, pp. 498-508, ainsi que B. Ribémont, « Froissart, le mythe et la marguerite » et « Froissart et le mythe de Daphné », Revue des langues romanes, 94, 1990, pp. 129-137 et 98, 1994, pp. 189-99.
    8 Voir notamment K. Brownlee, « Ovide et le moi poétique « moderne » à la fin du Moyen Âge : Jean Froissart et Christine de Pizan », Modernité au Moyen Âge : le défi du passé, éd. B. Cazelles et C. Méla, Genève, Publications de la Faculté des Lettres de l’Université de Genève, 1990, pp. 153-173 et S. Huot, « The Daisy and the Laurel : Myths of Desire and Creativity in the Poetry of Jean Froissart », Contexts : Style and Values in Medieval Art and Literature, éd. D. Poirion et N. Freeman-Regalado, Yale University, 1991, pp. 240-251.
    9 L'Espinette amoureuse, v. 2672.
    10 La Prison amoureuse, vv. 1990-1995.
    11 Le Joli Buisson de Jonece, vv. 405-413.
    12 Jean Froissart, Meliador, éd. A. Longnon, Paris, S.A.T.F., 1895-1899, vv. 28-41. On trouve une liste similaire plus loin dans le récit, vv. 11686-11689.
    13 Voir en particulier à ce sujet l'article de F. Bouchet, « Froissart et la matière de Bretagne : une écriture « déceptive », Arturus Rex. Volumen II : Acta conventus Lovaniensis 1987, éd. W. Van Hoecke, G. Tournoy et W. Verbeke, Louvain, Leuven University Press, 1991, pp. 367-375.
    14 S. Huot, art. cit., p. 243.
    15 L'Espinette amoureuse, vv. 2767-2770.
    16 Jean Froissart, « Dits » et « Débats », éd. A. Fourrier, Genève, Droz, 1979, Le Dit dou Bleu Chevalier, vv. 297-326.
    17 Voir M. Stanesco, « Sous le masque de Lancelot. Du comportement romanesque au Moyen Âge », Poétique, 61, 1985, pp. 23-33 et Jeux d’errance du chevalier médiéval. Aspects ludiques de la fonction guerrière dans la littérature du Moyen Âge flamboyant, Leiden, Brill, 1988.
    18 Le Livre des fais du bon messire Jehan le Maingre, dit Bouciquaut, mareschal de France et gouverneur de Jennes, éd. D. Lalande, Genève, Droz, 1985, pp. 27-28.
    19 Le Dit dou Bleu Chevalier, vv. 331-346.
    20 Voir Chrétien de Troyes, Le Chevalier de la Charete, éd. M. Roques, Paris, Champion, 1958, vv. 6112-6146.
    21 Voir D. Rieger, « Eslongié m'an de quanque j'amoie  : chevalier, clerc et vérité historique dans Le Dit dou Bleu Chevalier de Jean Froissart », Ecrire pour dire. Etudes sur le dit médiéval, éd. B. Ribémont, Paris, Klincksieck, 1990, pp. 169-192.
    22 L'Espinette amoureuse, vv. 23-34.
    23 Ibid., vv. 213-218.
    24 Le Livre des fais, p. 17.
    25 Ibid., p. 16.
    26 L'Espinette amoureuse, vv. 309-321.
    27 Ibid., vv. 325-328.
    28 Ibid., vv. 35-36.
    29 Voir A. Planche, « Culture et contre-culture dans L’Espinette amoureuse de Jean Froissart : les écoles et les jeux », Senefiance, 9, 1980, pp. 389-403.
    30 Voir Antoine de la Sale, Jehan de Saintré, éd. J. Blanchard et trad. M. Quereuil, Paris, Le Livre de Poche, 1995, p. 48.
    31 L’Espinette amoureuse, vv. 710-719.
    32 Ibid., vv. 737-739.
    33 Ibid., v. 785.
    34 Ibid., vv. 850-851.
    35 Le terme apparaît au vers 2153.
    36 Voir l'article de M. Stanesco, « ‘D'armes et d'amours’ : la fortune d'une devise médiévale », Travaux de littérature, 2, 1989, pp. 37-54.
    37 L'Espinette amoureuse, vv. 52-54.
    38 R. Morris, « Machaut, Froissart and the fictionalization of the self », The Modern Language Review, 83, 1988, p. 548.
    39 J. Cerquiglini, « Un engin si soutil ». Guillaume de Machaut et l'écriture au XIV siècle, Paris, Champion, 1985, p. 121.
    40 Ballades et rondeaux, éd. R.S. Baudouin, Genève, Droz, 1978, p. 6, vv. 21-25.
    41 C’est ce que F. Rigolot, dans Le Texte de la Renaissance. Des Rhétoriqueurs à Montaigne, Genève, Droz, 1982, appelle « l’usage différentiel du mythe » : « L’écrivain projette inconsciemment son moi dans un matériau qui, parce qu’il est collectif, lui semble opaque et donc sécurisant. [...] Le mythe antique est alors décalque du mythe personnel », pp. 206-207.
    42 Jean Froissart, Le Paradis d'Amour. L'orloge amoureus, éd. P.F. Dembowski, Genève, Droz, 1986, p. 63, vv. 958-962.
    43 Ibid., pp. 63-64, vv. 974-990.
    44 Ibid., vv. 936-944.
    45 Ibid., p. 117.
    46 J.H.M. Taylor, « The fourteenth century : context, text and intertext », The Legacy of Chrétien de Troyes, éd. N.J. Lacy, D. Kelly et K. Busby, Amsterdam, Rodopi, 1987, t. 1, p. 270.
    47 Meliador, vv. 9122-9133.

    Pour citer cet article

    Référence électronique

    Silvère Menegaldo, « L’exemple chevaleresque dans la poésie de Jean Froissart. », Cahiers de recherches médiévales, 6 | 1999, [En ligne], mis en ligne le 11 janvier 2007. URL : http://crm.revues.org//index941.html. Consulté le 09 novembre 2008.

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    Silvère Menegaldo

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    Chroniqueur et poète français (Valenciennes v.1337 – Chimay 1405 ?).<contribution id="2007595"></contribution>



    Il reçoit une formation religieuse, avant de partir en Angleterre en 1361 pour y servir Philippa de Hainaut, épouse d'Édouard III. Revenu dans sa province d'origine, il a pour protecteur Wenceslas de Brabant et, curé des Estinnes près de Mons, obtient un canonicat à Chimay. C'est ensuite Guy de Blois qui le fait travailler et il évolue davantage dans les milieux de la noblesse française, voyageant en Béarn à la cour d'Orthez, en Avignon, avant de revisiter l'Angleterre. Ces voyages lui permettent de compléter l'information dont il a besoin pour la rédaction de ses Chroniques. Utilisant diverses chroniques, des sources orales, des témoignages directs, son expérience personnelle, il fait le récit des guerres survenues depuis l'avènement d'Édouard III jusqu'à la mort de son petit-fils Richard II, entre 1325 et 1400. Les Chroniques sont divisées en 4 livres sans cesse remaniés, en fonction surtout des sympathies plus ou moins marquées de l'auteur pour l'Angleterre. Travail littéraire plus qu'historique – car il s'agit de fixer l'image de la vraie vertu, la prouesse –, même s'il s'avère un outil délicat à manier par l'historien, l'ouvrage constitue une évocation pittoresque de la vie de cour au XIVe siècle. Avant de se consacrer à la célébration des armes puis, parallèlement, à sa rédaction, Froissart avait composé des poèmes illustrant l'idéal courtois, soit dans le genre lyrique, soit dans le genre narratif, selon l'exemple de Guillaume de Machaut, son maître en poésie : le Paradis d'Amour (1361-1362), songe allégorique ; l'Horloge amoureuse (1368), allégorie du mécanisme amoureux, où l'auteur assimile l'amant à cet instrument de mesure du temps, nouveau encore pour l'époque ; l'Espinette amoureuse (1369), récit d'un premier amour, enrichi de digressions mythologiques et d'insertions lyriques, et influencé par Ovide et le Roman de la Rose. La Prison amoureuse (1371-1372) est inspirée par la composition du Voir-Dit de Guillaume de Machaut, avec ses poèmes, ses lettres en prose et sa narration en octosyllabes, mais cette consolation pour le prince Wenceslas de Brabant s'en distingue par les deux correspondants masculins et par l'insertion de deux dictiés (une histoire mythologique inventée par Froissart puis un songe de l'un des correspondants, sous le nom de Rose, qui donne son titre à l'œuvre) ; le Joli Buisson de Jeunesse (1373) est un retour à la jeunesse et une sorte d'adieu aux amours. Entre-temps, Froissart a rédigé le dernier grand roman arthurien, Meliador, dont il existe deux versions (1365 et 1380). D'une composition très lâche, celui-ci repose sur de multiples aventures entrelacées à une trame principale et des insertions lyriques dues au commanditaire, Wenceslas de Brabant. L'image de la chevalerie est idéalisée, les valeurs anciennes de courtoisie et de prouesse semblant inchangées, même si l'emporte désormais la recherche du bonheur individuel en lieu et place de la quête arthurienne d'autrefois.
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  • ean Froissart

    Biographie

    Né vers 1337 — Mort vers 1410

    Né à Valenciennes, Froissart s'attire la protection des comtes de Hainaut grâce à ses talents de poète, ce qui lui permet d'entrer, à partir de 1362, à la cour d'Édouard III en tant que clerc de chambre de la reine Philippa. Il fait alors de nombreux voyages en Europe occidentale: en 1365, en Écosse aux côtés du roi David Bruce; en 1366, à Bruxelles à la cour de Wenceslas et Jeanne de Brabant, puis en Aquitaine auprès du Prince Noir; en 1368, en Italie (Milan, Bologne, Ferrare et Rome) et en Savoie, avant un autre séjour à Bruxelles en 1369. C'est pendant cette période qu'il compose aussi la plupart de ses dits et debats. À la mort de la reine Philippa en août 1369, il retourne vivre en Hainaut et se rapproche alors de Wenceslas et Jeanne de Brabant, grâce auxquels il obtient avant 1373 la cure d'Estinnes-au-Mont. Commence alors la rédaction des Chroniques, parallèlement à la composition d'autres poèmes. À la demande du duc et avec sa collaboration, Froissart (re)compose son roman Melyador, probablement entre 1381 et 1383. À la mort du duc de Brabant en décembre 1383, c'est le comte de Blois, Guy II de Châtillon, qui devient le principal protecteur de l'écrivain, en lui obtenant notamment la charge de chanoine de Chimay.

    Pour recueillir les témoignages destinés à nourrir son récit des livres II et III des Chroniques, Froissart voyage à travers la France, en particulier dans la région pyrénéenne, en Béarn à l'automne 1388, puis à Orthez à la cour du comte de Foix, Gaston Fébus lors de l'hiver 1388-1389. Il assiste au mariage de Jeanne de Boulogne avec le duc de Berry en juin 1389 avant de passer par Avignon.

    Froissart se détache de la cour décadente de Guy de Châtillon vers 1391. La protection d'Aubert de Bavière et de Guillaume d'Ostrevant lui permet de poursuivre en Hainaut le travail touchant aux Chroniques, notamment la rédaction du livre IV et le deuxième remaniement du livre I. En 1395, le chroniqueur séjourne quelques mois en Angleterre à la cour de Richard II. Ses dernières années, principalement consacrées à la poursuite de la rédaction des Chroniques, se passent probablement à Chimay, où Froissart meurt entre 1404 et 1410.

    Principaux protecteurs: Jean de Hainaut; Philippa de Hainaut; Wenceslas et Jeanne de Brabant; Robert de Namur; Jean de Châtillon; Enguerrand VII de Coucy; Guy II de Châtillon, comte de Blois; Gaston Fébus, comte de Foix; Aubert de Bavière; Guillaume d'Ostrevant.

    Bibliographie

    Bibliographies
    • Voir la bibliographie exhaustive et régulièrement mise à jour de Godfried Croenen (University of Liverpool).
    Recueils
    • Poésies de J. Froissart, extraites de deux manuscrits de la Bibliothèque du Roi et publiées pour la première fois par J.-A. Buchon, Paris, Verdière, t. 10, 1829.
    • Œuvres complètes de Froissart. Chroniques, éd. J. Kervyn de Lettenhove, Bruxelles, 1867-1877, 28 t. — Réimpr.: Osnabrück, Biblio, 1967.
      Édition complète.
    • Œuvres de Froissart. Poésies, éd. Auguste Scheler, Bruxelles, Devaux, 1870-1872, 3 t. Réimpr.: Genève, Slatkine, 1977.
    Généralités
    • Fehse, Erich, « Sprichwort und Sentenz bei Eustache Deschamps und Dichtern seiner Zeit », Romanische Forschungen, 19:2, 1906, p. 545-594. [DZ]
    1. Le paradis d'amour

      Date: 1361-1362
      Forme: 1723 vers, en octosyllabes avec six insertions lyriques (une complainte, deux rondeaux, un lai, un virelai et une ballade)
      Langue: Français
      Contenu: Récit d'un songe du poète-amant: au mois de mai, dans un verger, régi par le dieu Amour, l'amant désespéré rencontre Plaisance et Espérance, puis Amour lui-même, qui lui prescrivent l'attitude à tenir pour bien servir celui-ci et mettent à l'épreuve sa créativité poétique. Après s'être entretenu avec sa dame, qui lui promet une plus grande aménité, et lui avoir récité une ballade à sa demande, le poète-amant se réveille réjoui et rassuré.
      Incipit: Je sui de moi en grant merveille
      Coument tant vifs, car moult je velle,
      Et on ne poroit en vellant
      Trouver de moi plus travellant...
      Explicit: ... Sont conforté, et c'est raisons,
      En songes et en visions.
      Ensi fui je ravis jadis
      Dedens l'Amoureus Paradis.
      Manuscrits
      1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
      2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
      Éditions modernes
      • Jean Froissart, Le Paradis d'Amour. L'Orloge amoureus. Édition avec notes, introduction et glossaire par Peter F. Dembowski, Genève, Droz (Textes littéraires français, 339), 1986, 149 p.
      Traductions modernes
      • en français:
        Études
        • Le temple d'Honneur

          Date: 1363
          Forme: 1076 octosyllabes
          Langue: Français
          Contenu: Épithalame composé à l'occasion du mariage de Humphrey X de Bohun et Jeanne d'Arundel. Récit d'un songe: le narrateur rencontre dans une forêt un chevalier, qui l'informe du mariage de Désir et Plaisance au temple d'Honneur, père du jeune marié. Les deux compagnons s'y rendent et assistent à la cérémonie, où Honneur expose la conduite à tenir pour bien servir Amour et Honneur.
          Incipit: Je cuide et croi, et s'est mes dis
          (Ensi l'ai je veü toutdis)
          Qu'il n'est onques jours qui ajourne,
          Soit qu'on travelle ou qu'on sejourne...
          Explicit: ... Il le m'acorda de mon droit,
          Et puis se me dist qu'il vodroit
          Estre toutdis en tel sejour.
          Lors m'esvillai, car il fu jour.
          Manuscrits
          1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
          2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
          Éditions modernes
          • Jean Froissart, Dits et débats. Introduction, édition, notes et glossaire par Anthime Fourrier, avec en appendice quelques poèmes de Guillaume de Machaut, Genève, Droz (Textes littéraires français, 274), 1979, 337 p.
            CR: J. Monfrin, dans Romania, 101, 1980, p. 429. — G. Roques, dans Zeitschrift für romanische Philologie, 96, 1980, p. 685. — Jacques Lemaire, dans Scriptorium, 35:1, 1981, p. 168-169. * — N. Wilkins, dans French Studies, 36, 1982, p. 186-187.
          Traductions modernes
          • en français:
            Études
            • Le joli mois de mai

              Date: 1363
              Forme: 461 vers, répartis en strophes tantôt d'octosyllabes et de tétrasyllabes combinés, tantôt d'octosyllabes, et en trois insertions lyriques (deux ballades et un virelai)
              Langue: Français
              Contenu: Au mois de mai, dans un verger, le chant d'un rossignol évoque au poète le souvenir de celle qu'il aime, mais qui le traite avec dureté. Pourtant, le poète-amant se rappelle sa beauté, ce qui, avec le plaisir et la joie suscités par le lieu, lui inspire des chansons et ravive son amour. C'est heureux de servir Amour qu'il quitte le verger.
              Incipit: Pensans a l'amoureuse vie,
              Dont tous coers doit avoir envie
              De poursieuir,
              Car elle est la plus envoisie...
              Explicit: ... Car tout le bien et l'atente
              Qu'en moi ai
              Me vient de vous, bien le sçai,
              Tant estes plaisans et gente.
              Ma dame, etc.
              Manuscrits
              1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
              2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
              Éditions modernes
              • Jean Froissart, Dits et débats. Introduction, édition, notes et glossaire par Anthime Fourrier, avec en appendice quelques poèmes de Guillaume de Machaut, Genève, Droz (Textes littéraires français, 274), 1979, 337 p.
                CR: J. Monfrin, dans Romania, 101, 1980, p. 429. — G. Roques, dans Zeitschrift für romanische Philologie, 96, 1980, p. 685. — Jacques Lemaire, dans Scriptorium, 35:1, 1981, p. 168-169. * — N. Wilkins, dans French Studies, 36, 1982, p. 186-187.
              Traductions modernes
              • en français:
                Études
                • Le dit de la margheritte

                  Date: 1364
                  Forme: 192 vers, répartis en strophes de décasyllabes et de tétrasyllabes combinés
                  Langue: Français
                  Contenu: Éloge de la marguerite, dont le poète situe l'origine dans l'histoire mythologique de Céphée et Héro.
                  Incipit: Je ne me doi retraire de loer
                  La flour des flours, prisier et honnourer,
                  Car elle fait moult a recommender:
                  C'est la consaude, ensi le voel noumer...
                  Explicit: ... Dont navrés sui si, en soi regardant,
                  Que membre n'ai ou li cops ne s'espant.
                  Mais la vertu au dieu d'Amours demant
                  De moi garir.
                  Manuscrits
                  1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                  2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                  Éditions modernes
                  • Jean Froissart, Dits et débats. Introduction, édition, notes et glossaire par Anthime Fourrier, avec en appendice quelques poèmes de Guillaume de Machaut, Genève, Droz (Textes littéraires français, 274), 1979, 337 p.
                    CR: J. Monfrin, dans Romania, 101, 1980, p. 429. — G. Roques, dans Zeitschrift für romanische Philologie, 96, 1980, p. 685. — Jacques Lemaire, dans Scriptorium, 35:1, 1981, p. 168-169. * — N. Wilkins, dans French Studies, 36, 1982, p. 186-187.
                  Traductions modernes
                  • en français:
                    Études
                    • Le dit dou bleu chevalier

                      Date: 1364
                      Forme: 504 vers, répartis en strophes de décasyllabes et de tétrasyllabes combinés
                      Langue: Français
                      Contenu: Le narrateur rencontre le Bleu Chevalier, désespéré de sa situation d'emprisonnement, qui le tient éloigné depuis trop longtemps de sa dame et l'empêche d'exercer sa vaillance. Les conseils avisés du narrateur rendent sa joie au chevalier et l'incitent à composer un dittier qu'il offrira à sa dame en gage de son amour.
                      Incipit: On cerche bien ce qu'on ne poet trouver,
                      Si troeve l'en souvent sans demander
                      Ce qu'on ne cuide veoir ne encontrer.
                      Pour moi le di...
                      Explicit: ... Mes je suppli pour tous les vrais amans
                      Au dieu d'Amours qu'il lor soit confortans,
                      Ensi qu'il scet que leur besoings est grans
                      En pluisours cas.
                      Manuscrit
                      1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                      Éditions modernes
                      • Jean Froissart, Dits et débats. Introduction, édition, notes et glossaire par Anthime Fourrier, avec en appendice quelques poèmes de Guillaume de Machaut, Genève, Droz (Textes littéraires français, 274), 1979, 337 p.
                        CR: J. Monfrin, dans Romania, 101, 1980, p. 429. — G. Roques, dans Zeitschrift für romanische Philologie, 96, 1980, p. 685. — Jacques Lemaire, dans Scriptorium, 35:1, 1981, p. 168-169. * — N. Wilkins, dans French Studies, 36, 1982, p. 186-187.
                      Traductions modernes
                      • en français:
                        Études
                        • Le debat dou cheval et dou levrier

                          Date: Fin de 1365
                          Forme: 92 octosyllabes
                          Langue: Français
                          Contenu: Sur le chemin du retour d'Écosse, Grisel, le cheval sur lequel chemine le narrateur, et son lévrier débattent pour déterminer qui des deux est le plus à plaindre au service de leur maître. L'arrivée à destination met fin à l'échange.
                          Incipit: Froissars d'Escoce revenoit
                          Sus un cheval qui gris estoit;
                          Un blanc levrier menoit en lasse.
                          « Las !, dist li levriers, je me lasse!...
                          Explicit: ... Respont Griseaus: « Ossi ferai je,
                          Car de mengier grant talent ai je. »
                          Froissars atant vint a la ville
                          Et la fallirent leur concile.
                          Manuscrits
                          1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                          Éditions modernes
                          • Jean Froissart, Dits et débats. Introduction, édition, notes et glossaire par Anthime Fourrier, avec en appendice quelques poèmes de Guillaume de Machaut, Genève, Droz (Textes littéraires français, 274), 1979, 337 p.
                            CR: J. Monfrin, dans Romania, 101, 1980, p. 429. — G. Roques, dans Zeitschrift für romanische Philologie, 96, 1980, p. 685. — Jacques Lemaire, dans Scriptorium, 35:1, 1981, p. 168-169. * — N. Wilkins, dans French Studies, 36, 1982, p. 186-187.
                          Traductions modernes
                          • en français:
                            Études
                            • L'orloge amoureus

                              Date: 1368
                              Forme: 1174 décasyllabes
                              Langue: Français
                              Contenu: Le poète compare son sentiment amoureux au mécanisme de l'horloge.
                              Incipit: Je me puis bien comparer a l'orloge,
                              Car quant Amours, qui en mon coer se loge,
                              M'i fait penser et mettre y mon estude,
                              G'i aperçoi une similitude...
                              Explicit: ... Et s'en serai plus liés et plus entiers
                              En tous mes fes. Et il m'est grans mestiers
                              Qu'il soit ensi. Et vos frans coers le voeille,
                              Que en bon gré cesti dittié recoeille.
                              Manuscrits
                              1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                              Éditions modernes
                              • Jean Froissart, Le Paradis d'Amour. L'Orloge amoureus. Édition avec notes, introduction et glossaire par Peter F. Dembowski, Genève, Droz (Textes littéraires français, 339), 1986, 149 p.
                              Études
                              • L'espinette amoureuse

                                Date: 1369
                                Forme: 4198 vers, répartis en octosyllabes et en 14 insertions lyriques (cinq ballades, trois virelais, trois rondeaux, une complainte, un confort et un lai)
                                Langue: Français
                                Contenu: Froissart raconte la première histoire amoureuse qu'il vécut. Il rencontra sa bien-aimée alors qu'elle était occupée à lire Cleomadés. Se noua entre eux une relation nourrie par leur goût commun pour la littérature, mais aussi par l'amour dont s'éprend le jeune homme pour son amie sans oser le lui déclarer ouvertement. Même l'aide d'une amie intime de la demoiselle n'y fait rien. À la nouvelle du mariage de celle-ci, l'amoureux déçu s'embarque pour l'étranger afin de recouvrer sa santé. Mais l'image de sa bien-aimée qu'il voit dans un miroir lui ayant appartenu le pousse à revenir dans son pays. Ramené à l'espoir quant à la bienveillance de la demoiselle à son égard, il la rencontre à maintes reprises, mais toujours dans la retenue, ce qui offre de touchantes scènes de compositions lyriques agrémentées parfois de dons floraux. La jeune fille finit par agréer son ami, avant de finalement lui retirer sa promesse d'amour loyal et de le fuir, sur les conseils de sa confidente Male Bouche. Cette fin décevante inspire cependant au poète-narrateur un lai, qui clôt le roman.
                                Incipit: Pluiseur enfant de jone eage
                                Desirent forment le peage
                                D'Amours paiier, mais s'il savoient
                                Ou se la congnisance avoient...
                                Explicit: ... De confort, adont resjoïs
                                Serai de ce dont ne joïs,
                                Ains languis en vie ewireuse
                                Dedens l'Espinete amoureuse.
                                Manuscrits
                                1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                                Éditions modernes
                                • Jean Froissart, L'Espinette amoureuse. Édition avec introduction, notes et glossaire par Anthime Fourrier, Paris, Klincksieck (Bibliothèque française et romane. Série B: Textes et documents, 2), 1962, 202 p.; 2e éd., 1971, 206 p.; 3e éd., (Librairie Klincksieck. Série Textes, 1), 2002.
                                Traductions modernes
                                • en français:
                                  Études
                                  • Vitz, Evelyn Birge, « Erotic reading in the Middle Ages: performance and re-performance of romance », Performing Medieval Narrative, éd. Evelyn Birge Vitz, Nancy Freeman Regalado et Marilyn Lawrence, Cambridge, Brewer, 2005, p. 73-88.
                                • La prison amoureuse

                                  Date: 1371-1373
                                  Commanditaire: Wenceslas de Luxembourg, duc de Brabant (1337–1383) (?)
                                  Forme: 3899 octosyllabes avec insertions lyriques (huit virelais, six ballades, un lai et une complainte) et douze lettres en prose
                                  Langue: Français
                                  Contenu: Il s'agit d'une correspondance poétique entre Flos, le poète-narrateur, et Rose, un de ses amis, qui lui demande conseil pour conduire ses affaires de cœur, notamment au moyen de chansons de leur composition. Parallèlement à cela, Flos, dont le cœur est aussi épris d'une dame, multiplie les occasions de rencontre avec celle-ci, qui ne répond cependant pas comme il l'espère à ses timides attentions poétiques.
                                  Incipit: Li philozophes nous aprent
                                  En un capitle ou il reprent
                                  D'une auctorité un notable
                                  Pour toutes gens moult pourfitable...
                                  Explicit: ... La discretion des sus dis
                                  Que, dou present et de jadis,
                                  Tout ira par paie euwireuse.
                                  Chi faut la Prison amoureuse.
                                  Manuscrits
                                  1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                  2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                                  Éditions modernes
                                  • Jean Froissart, La prison amoureuse. Édition avec introduction, notes et glossaire par Anthime Fourrier, Paris, Klincksieck (Bibliothèque française et romane. Série B: Éditions critiques de textes, 13), 1974, 220 p.
                                  Traductions modernes
                                  • en français:
                                    Études
                                    • de Medeiros, Marie-Thérèse, « Du dit comme divertissement: le cas de La prison amoureuse de Froissart », L'imaginaire courtois et son double, éd. Giovanna Angeli et Luciano Formisano, Napoli, 1992, p. 165-172.
                                    • Heidenreich Findley, Brooke, « Deadly words, captive imaginations: women and poetic creation in Jean Froissart's Prison amoureuse », French Forum, 32:3, 2007, p. 1-21.
                                    • Kibler, William W., « Poet and patron: Froissart's Prison amoureuse », L'esprit créateur, 18, 1978, p. 32-46.
                                    • Menegaldo, Silvère, « Les relations entre poète et mécène dans La prison amoureuse de Jean Froissart », Patrons, Authors and Workshops: Books and Book Production in Paris Around 1400, éd. Godfried Croenen et Peter Ainsworth, Louvain, Paris et Dudley, Peeters (Synthema, 4), 2006, p. 239-254.
                                    • Nouvet, Claire, « Pour une économie de la dé-limitation: La prison amoureuse de Jean Froissart », Neophilologus, 70, 1986, p. 341-356.
                                    • Thiry, Claude, « Allégorie et histoire dans La prison amoureuse de Froissart », Studi francesi, 21, 1977, p. 15-29.
                                  • Le joli buisson de jonece

                                    Date: Novembre 1373
                                    Forme: 5442 vers, répartis en octosyllabes et en 28 insertions lyriques (deux ballades, treize virelais, trois rondeaux, deux lais et huit souhaits)
                                    Langue: Français
                                    Contenu: Philosophie exhorte le poète à continuer d'exercer le métier auquel Nature l'a disposé. Après lui avoir opposé plusieurs arguments, dont celui du salut de son âme, le poète sort d'un coffret un portrait oublié de sa dame, qui le plonge dans sa jeunesse. Il se rend en songe avec Vénus dans le Buisson de Jeunesse, que lui explique et lui fait visiter l'allégorie qui donne son nom au lieu. Là, il retrouve celle qu'il aima autrefois et, tout en participant aux divertissements dont elle s'amuse avec sa compagnie, il tente de se déclarer, mais sans succès. L'aventure reste en suspens, car le poète se réveille. Face au caractère vain de telles préoccupations charnelles, le poète-narrateur préfère assurer le salut de son âme en implorant la bienveillance de la Vierge Marie par le lai de Notre-Dame qui clôt le poème.
                                    Incipit: Des aventures me souvient
                                    Dou temps passé. Or me couvient,
                                    Entroes que j'ai sens et memore,
                                    Encre et papier et escriptore...
                                    Explicit: ... Et nous taint,
                                    Que no claint
                                    Aient vois en ton demainne,
                                    La ou toute joie maint.
                                    Manuscrits
                                    1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                    2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                                    Éditions modernes
                                    • Jean Froissart, Le joli buisson de jonece. Édition avec introduction, notes et glossaire par Anthime Fourrier, Genève, Droz (Textes littéraires français, 222), 1975, 298 p. — Réimpr.: 1977.
                                    Traductions modernes
                                    • en français:
                                      • Jean Froissart, Le joli buisson de jeunesse. Traduction en français moderne par Marylène Possamaï-Pérez, Paris, Champion (Traductions des Classiques français du Moyen Âge, 57), 1995, 131 p.
                                    Études
                                    • Le dit dou florin

                                      Date: 1389
                                      Forme: 492 octosyllabes
                                      Langue: Français
                                      Contenu: À un florin qu'il retrouve au fond de sa bourse le poète-narrateur fait part de la perte fâcheuse de quarante de francs qu'il a subie à Avignon. C'est l'occasion de rappeler tous ceux qui ont protégé le poète. En guise de réparation du dommage subi, le florin suggère à son propriétaire de demander à quatre de ses amis (Bureau de la Rivière, le comte de Sancerre, le dauphin d'Auvergne et le vicomte d'Acy) de lui donner chacun dix francs en échange du poème.
                                      Incipit: Pour bien savoir argent desfaire,
                                      Si bien qu'on ne le scet refaire,
                                      Rapiecier ne remettre ensamble,
                                      (Car tel paour a que tous tramble...
                                      Explicit: ... Aussi a fait Gerars d'Obies,
                                      Qui pas n'a jué aux oublies:
                                      « Autant vaudront au Jugement
                                      Estront de chien que marq d'argent! »
                                      Manuscrits
                                      1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                      Éditions modernes
                                      • Jean Froissart, Dits et débats. Introduction, édition, notes et glossaire par Anthime Fourrier, avec en appendice quelques poèmes de Guillaume de Machaut, Genève, Droz (Textes littéraires français, 274), 1979, 337 p.
                                        CR: J. Monfrin, dans Romania, 101, 1980, p. 429. — G. Roques, dans Zeitschrift für romanische Philologie, 96, 1980, p. 685. — Jacques Lemaire, dans Scriptorium, 35:1, 1981, p. 168-169. * — N. Wilkins, dans French Studies, 36, 1982, p. 186-187.
                                      Traductions modernes
                                      • en français:
                                        Études
                                        • La plaidoirie de la rose et de la violette

                                          Date: 1392-1393
                                          Forme: 342 octosyllabes
                                          Langue: Français
                                          Contenu: On assiste au procès qui oppose, devant Imagination, la Rose à la Violette par l'intermédiaire de leurs avocats, pour déterminer laquelle des deux fleurs l'emporte sur l'autre. Au final, le juge renvoie l'affaire en appel au Lys, la souveraine des fleurs.
                                          Incipit: Devant Ymagination,
                                          Ou on doit par droite action
                                          Mettre memores et escrips,
                                          Fu une fois .I. plais empris...
                                          Explicit: ... Qui li doient foi et consel.
                                          Alés la, je le vous consel.
                                          – Dame, dist chils, c'est nos pourpos. »
                                          Atant fu la chils procés clos.
                                          Manuscrits
                                          1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                          Éditions modernes
                                          • Jean Froissart, Dits et débats. Introduction, édition, notes et glossaire par Anthime Fourrier, avec en appendice quelques poèmes de Guillaume de Machaut, Genève, Droz (Textes littéraires français, 274), 1979, 337 p.
                                            CR: J. Monfrin, dans Romania, 101, 1980, p. 429. — G. Roques, dans Zeitschrift für romanische Philologie, 96, 1980, p. 685. — Jacques Lemaire, dans Scriptorium, 35:1, 1981, p. 168-169. * — N. Wilkins, dans French Studies, 36, 1982, p. 186-187.
                                          Traductions modernes
                                          • en français:
                                            Études
                                            • Poème historique

                                              Date:  
                                              Forme: Vers octosyllabiques à rimes plates
                                              Langue: Français
                                              Contenu:  
                                              Incipit:  
                                              Explicit:  
                                              Manuscrits
                                              1. Berlin, Staatsbibliothek und Preussischer Kulturbesitz, 33 A, f. 35
                                                Fragment de 49 vers.
                                              2. Paris, Bibliothèque nationale de France, nouvelles acquisitions françaises, 7554
                                                Fragment de 36 vers.
                                              Éditions modernes
                                              • Delisle, L., « Fragment d'un poème historique du XIVe siècle », Bibliothèque de l'École des chartes, 60, 1899, p. 611-616. [Gall]
                                              • Stutzmann, Dominique, « Un deuxième fragment du poème historique de Froissart », Bibliothèque de l'École des chartes, 164:2, 2006, p. 573-580.
                                              Études
                                              • Chroniques

                                                • Livre I

                                                  Date: 1370-1373 (première version)
                                                  Commanditaire: Robert de Namur (première version)
                                                  Forme: Prose
                                                  Langue: Français
                                                  Contenu: Récit des événements politiques et militaires de 1325 à 1369, 1372 ou 1377 selon les versions (la question de Guyenne, la guerre nationale dès le règne de Charles V, le règne d'Édouard II, le conflit anglo-écossais, l'avènement d'Édouard III, la bataille de Crécy, les bourgeois de Calais, les événements de Castille en 1366-1367, etc.).
                                                  Incipit du ms. d'Amiens: Affin que li grant fait d'armes qui par les guerres de Franche et d'Engleterre sont avenu, soient notablement registré et mis en memore perpetuel par quoy li bon y puissent prendre exemple, je me voeil ensonniier dou mettre en prose... (ms. d'Amiens [« deuxième rédaction »], Bibl. mun. n° 486, éd. Diller 1991-1998)
                                                  Explicit du ms. d'Amiens: ... En ce tamps, se faisoit une grant assamblee de gens d'armes en le marce de Bourdiaux au mandement dou ducq d'Anjo et du connestable car il avoient une journee arestee contre les Gascons englés, de la quelle je parlerai plus plainnement quant j'en seray mieux enfourmés. (ibid.)
                                                  Incipit du ms. de Rome: Afin que les grans mervelles et li biau fait d'armes, liquel sont avenu par les gerres de France et d'Engleterre et des roiaulmes voisins, conjoins et ahers avoecques euls, dont li roi sont cause, soient notablement registré, et ou temps present et a venir, veu et congneu, je Jehans Froissars, tresoriers et chanonnes de Chimay, me voel ensonniier de metre en prose... (ms. de Rome [dernière rédaction], Reg. lat. 869, Diller 1972)
                                                  Explicit du ms. de Rome: ... Et puis fu Jehans ses ainnés fils, dus de Normendie, rois, et sacrés et couronnés en l'eglise de Nostre Dame de Rains a tres haulte solempnité. Tantos apriés son couronnement, il s'en retourna a Paris et entendi a faire ses pourveances et ses besongnes car les trieuwes es[toient fallies entre lui et le roy d'Engleterre]. (ibid.)
                                                  Remaniements: Premier remaniement par Froissart lui-même entre 1376 et 1383 (dédié à Guy II, comte de Blois; ms. Amiens, Bibliothèque municipale, 486)
                                                  Peut-être un deuxième remaniement par l'auteur lui-même
                                                  Dernier remaniement par l'auteur lui-même entre 1399 et 1410 (ms. Rome, Bibliothèque du Vatican, Reg. Lat. 869)
                                                • Livre II

                                                  Date: 1383-1387
                                                  Commanditaire: Guy II de Châtillon, comte de Blois († 1397)
                                                  Forme: Prose
                                                  Langue: Français
                                                  Contenu: Récit des événements des années 1377 à 1386 (troubles sociaux de Flandre, d'Angleterre et de France, Louis de Male, siège de Gand, Charles VI, etc.).
                                                  Incipit: En ce temps que li dus de Bourgoigne fist son armee en Pikardie, sicomme il est contenu chi dessus, li dus d'Ango estoit en le bonne cité de Thoulouse dalés madame sa femme, et visoit et soutilloit nuit et jour comment il porroit porter contraire et dammaige les Englés... (éd. Kervyn de Lettenhove, t. IX)
                                                  Explicit: ... Aprés que monseigneur et madame de Bourgongne eurent sejourné à l'Escluse trois jours, il se partirent et vindrent au giste a Bruges sur le tart, et jamais l'on ne veist plus belle alumerie que ceulx de Bruges firent a la venue et entree de monseigneur et de madame de Bourgongne en la dicte ville. (éd. Kervyn de Lettenhove, t. X)
                                                  Remaniements: Peut-être un remaniement
                                                • Livre III

                                                  Date: 1389-1392
                                                  Commanditaire: Guy II de Châtillon, comte de Blois († 1397)
                                                  Forme: Prose
                                                  Langue: Français
                                                  Contenu: Récit des événements des années 1383 à 1389 (voyage en Béarn, guerre des Castillans et des Portugais, Gaston Fébus, etc.).
                                                  Incipit: Je me suis pour les guerres de Flandres qui moult durerent, longuement tenu a parler des besoingnes des loingtaines marches; mais les prochaines, quant a present, m'ont esté si fresches, si nouvelles et si enclines a ma plaisance, que pour ce les ay mises arriere... (éd. Kervyn de Lettenhove, t. XI)
                                                  Explicit: ... Et aussi, se il plaist a mon tres chier et honnouré seigneur monseigneur le conte Guy de Bloys a la requeste et plaisance duquel je ay travaillié a ceste haulte et noble histoire, il me le dira, et pour l'amour de luy je y entendray, et de toutes choses advenues depuis ce tiers livre clos je m'ensonnyeray voulentiers. (éd. Kervyn de Lettenhove, t. XIII)
                                                • Livre IV

                                                  Date: 1390-1405 (?)
                                                  Commanditaire: Guy II de Châtillon, comte de Blois († 1397)
                                                  Forme: Prose
                                                  Langue: Français
                                                  Contenu: Récit des événements de 1389 à la mort de Richard II en 1400 (entrée d'Isabeau à Paris, Pierre de Craon, mort du comte de Foix, règne de Richard II, dernier voyage en Angleterre, etc.).
                                                  Incipit: A la requeste, contemplation et plaisance de tres hault et noble prince mon tres chier seigneur et maistre Guy de Chastillon, conte de Blois, seigneur d'Avesnes, de Chimay et de Beaumont, de Sconnehove et de la Gode, je Jehan Froissart, prestre et chappelain a mon tres chier seigneur dessu nommé et pour le temps de lors tresorier et chanone de Chimay et de Lille-en-Flandres, me suis de novel resveillié et entré dedens ma forge... (éd. Kervyn de Lettenhove, t. XIV)
                                                  Explicit: ... Le pape Boniface, qui trop perdy a ceste transmutation, envoia ung legal en Allemaigne pour preschier les Liegois et pour les faire retourner a sa creance; mais le legal ne osa passer Coulongne et envoia lettres au Liege. On lisy les lettres, et fut dit au message: « Ne retourne plus pour tels choses sur la peyne d'estre noyé, car autant de messages qui vendront icy pour telle matiere, certes nous les jetterons en Mouse. » (éd. Kervyn de Lettenhove, t. XVI)
                                                Traductions: Traduction flamande de Gerrit Potter Vander Loo, 1470 [livres II et III]
                                                Continuation: Enguerrand de Monstrelet
                                                Manuscrits Éditions anciennes
                                                • Paris, Antoine Vérard, 1495, 4 t.
                                                • Paris, G. du Pré, 1530, 4 t. en 3 vol.
                                                • Lyon, J. de Tournes et D. Sauvage, 1559-1561, 4 t. en 2 vol.
                                                Éditions modernes
                                                • Les Chroniques de sire Jean Froissart (1824-1829), éd. Jean Alexandre Buchon, Paris, Wattelier, rééd., 1867, 3 t.
                                                  Édition complète.
                                                • Œuvres complètes de Froissart. Chroniques, éd. J. Kervyn de Lettenhove, Bruxelles, 1867-1877, t. 2-25. — Réimpr.: Osnabrück, Biblio, 1967.
                                                  Édition complète.
                                                • Chroniques de Jean Froissart éd. Siméon Luce, Gaston Raynaud, Léon et Albert Mirot, Paris, Société de l'Histoire de France, 1869-1975, 15 t.
                                                  Édition complète.
                                                • Voyage en Béarn, éd. Armel Hugh Diverres, Manchester, Manchester University Press, 1953.
                                                • Froissart, Chroniques. Dernière rédaction du premier livre. Édition du manuscrit de Rome Reg. lat. 869, éd. George T. Diller, Paris et Genève, Droz, 1972.
                                                • Chroniques. Livre I. Le manuscrit d'Amiens. Bibliothèque municipale no 486, éd. George T. Diller, Genève, Droz, 1991-1998, 5 t.
                                                • Jean Froissart, Chroniques. Livre I (première partie, 1325–1350) et Livre II, rédaction du manuscrit de New York, Pierpont Morgan Library M.804. Éditions et textes présentés et commentés par Peter F. Ainsworth et George T. Diller, Paris, Librairie générale française (Le Livre de Poche. Lettres gothiques, 4556), 2001, 1246 p.
                                                • Jean Froissart, Chroniques. Livre III (du Voyage en Béarn à la campagne de Gascogne) et Livre IV (1389-1400). Texte présenté, établi et commenté par Peter F. Ainsworth et Alberto Varvaro, Paris, Librairie générale française (Le Livre de Poche. Lettres gothiques, 4563), 2004, 1022 p.
                                                • Jean Froissart, Chroniques. Livre III. Le manuscrit Saint-Vincent de Besançon, Bibliothèque municipale, ms. 865, édité par Peter F. Ainsworth avec une étude codicologique par Godfried Croenen, Genève, Droz (Textes littéraires français, 594), 2007, 510 p.
                                                  CR: YWMLS 2007
                                                Traductions modernes
                                                • en anglais:
                                                  • John Bourchier Lord Berners, The Chronicle of Froissart, 1523-1525, 1re éd. moderne 1901-1903, rééd., New York, AMS Press, 1967, 6 t.
                                                  • Chroniques, trad. ang. Geoffrey Brereton, Hardmonsworth, Penguin Books, 2e éd., 1978.
                                                    Traduction partielle.
                                                • en espagnol:
                                                  • Résumé espagnol de Diego Gracián, pour Juste Walter Alemán, secrétaire de Charles V, 1560
                                                • en français:
                                                  • Historiens et chroniqueurs du Moyen Âge, trad. fr. Albert Pauphilet et Edmond Pognon, Paris, Gallimard (Bibliothèque de la Pléiade), 1952; 3e éd., 1986, p. 367-944.
                                                    Traduction partielle.
                                                  • Chroniques de Flandre, de Hainaut et d'Artois au temps de la guerre de Cent Ans (1328–1390), trad. fr. Denise Poulet, La Ferté-Milon, Trésors littéraires médiévaux du nord de la France, 1987.
                                                    Traduction partielle.
                                                  • Romanciers du Moyen Âge, trad. fr. Marie-Thérèse de Medeiros, Paris, Le Livre de Poche, 1987, p. 192-206.
                                                    Traduction partielle.
                                                  • Chroniques, trad. fr. André Duby, Paris, Stock (Moyen Âge), 1997.
                                                    Traduction partielle.
                                                  • Chroniques, trad. fr. Nathalie Desgrugillers, Clermont-Ferrand, Paleo (Les sources de l'histoire de France), 2003-2007, 7 t.
                                                • en italien:
                                                  • Résumé italien de Francesco Guicciardini, 1525
                                                • en latin:
                                                  • Résumé latin de Johannes Sleidanus, Paris, 1537
                                                Études
                                                • Melyador

                                                  Titres: Autres titres attribués au manuscrit BnF, fr. 12557 au XIXe siècle avant sa découverte et son édition par A. Longnon: Roman du roy Artus (sur la reliure) et Roman de Camel et d'Hermondine (dans les catalogues manuscrits de la BnF). Bien que couramment employée par la critique, la graphie Meliador (avec i) n'est attestée par aucun manuscrit.
                                                  Date: Entre 1362 et 1369 pour la première rédaction; autour de 1381-1382 pour la seconde.
                                                  Commanditaire: Wenceslas de Luxembourg, duc de Brabant (1337–1383), pour la version remaniée
                                                  Dédicataire: Le texte a été amputé de la partie où le narrateur s'apprête à nommer le dédicataire, mais on peut supposer qu'il s'agit de Wenceslas de Brabant.
                                                  Forme: Plus de 30 770 vers: récit en octosyllabes et 79 insertions lyriques (ballades, rondeaux, virelais)
                                                  Langue: Français
                                                  Contenu: Une quête est organisée par la princesse d'Écosse, Hermondine, et sa cousine Florée afin d'évincer le chevalier Camel de Camois, prétendant indigne de la main de l'héritière écossaise. L'événement permettra par la même occasion de révéler le chevalier le plus vaillant, auquel reviendra la main de la princesse. Participent notamment à la quête Mélyador, Agamanor et Gracien, qui finiront par épouser respectivement Hermondine, Phénonée (sœur de Mélyador) et Florence (cousine d'Hermondine). L'histoire du jeune héritier légitime du trône irlandais, Sagremor, en formation à la cour d'Arthur, croise cette intrigue principale tout en restant suspendue à la fin du roman.
                                                  Incipit: En ce temps que li rois Artus,
                                                  qui tant fu plain de grans vertus,
                                                  de sens, d'onneur et de larghece,
                                                  regnoit au point de sa jonece...
                                                  Explicit: ... Mais je vous voeil, il est mestiers,
                                                  ains que j'en die plus avant,
                                                  nommer nom et sournom devant
                                                  dou gentil signeur qui ce livre
                                                  me fist faire et qui me delivre.
                                                  Remaniement: La version connue de Melyador résulte probablement du remaniement, par Jean Froissart lui-même, d'une première rédaction.
                                                  Manuscrits
                                                  1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 12557, f. 1ra-227vb (B)
                                                    Manuscrit presque complet.
                                                  2. Paris, Bibliothèque nationale de France, nouvelles acquisitions latines, 2374, f. 36ra-39vb (A)
                                                    Quatre fragments, autrefois conservés aux Archives nationales, à Paris, sous la cote T* 210, nos 65 et 67 (section administrative), puis sous la cote M 877, no 34 (section historique)
                                                  3. localisation actuelle inconnue: un exemplaire de Melyador dans la bibliothèque de Charles d'Orléans. Il est mentionné pour la dernière fois dans l'inventaire de 1466 du château de Blois.
                                                  Éditions modernes
                                                  • Longnon, Auguste, « Un fragment retrouvé du Meliador de Froissart », Romania, 20, 1891, p. 403-416. [Gall]
                                                    Édition du fragment A.
                                                  • Méliador par Jean Froissart, roman comprenant les poésies lyriques de Wenceslas de Bohême, duc de Luxembourg et de Brabant, publié pour la première fois par Auguste Longnon, Paris, Firmin Didot (Société des anciens textes français, 35), 1895-1899, 3 t., lxxiii + 269, 372 et 381 p. [Gall: t. 1, t. 2, t. 3]
                                                    Réimpr.: New York et London, Johnson, 1965.
                                                    Voir l'Introduction, t. 1, pour une présentation du manuscrit.
                                                  • Bragantini-Maillard, Nathalie, "Melyador" de Jean Froissart, roman en vers de la fin du XIVe siècle: édition critique et commentaire (v. 1-14743), doctorat, Université de Paris IV–Sorbonne, 2007.
                                                    Thèse à soutenir en octobre 2007; deuxième partie à venir.
                                                  Traductions modernes
                                                  • en français:
                                                    • Romanciers du Moyen Âge, trad. fr. Marie-Thérèse de Medeiros, Paris, Le Livre de Poche, 1987, p. 139-143.
                                                      Traduction partielle.
                                                    • Jean Froissart, Meliador (extraits), trad. fr. Florence Bouchet, dans La légende arthurienne. Le Graal et la Table ronde, éd. Danielle Régnier-Bohler, Paris, Laffont (Bouquins), 1989, p. 1039-1078. *
                                                      Traduction partielle.
                                                  Études
                                                  • Baumgartner, Emmanuèle, « Écosse et Écossais : l'entrelacs de la fiction et de l'histoire dans les Chroniques et le Méliador de Froissart », L'image de l'autre européen. XVe–XVIIIe siècles, éd. J. Dufournet, A. C. Fiorato et A. Redondo, Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 1992, p. 11-21 et 53-55.
                                                  • Boivin, Jeanne-Marie, « L'Irlande et les Irlandais dans l'œuvre de Froissart: métamorphoses d'un mythe », Et c'est la fin pour quoy sommes ensemble. Hommage à Jean Dufournet, éd. J.-C. Aubailly et al., Paris, Champion, t. 1, 1993, p. 227-241.
                                                  • Boivin, Jeanne-Marie, « Le mythe irlandais dans la littérature du Moyen Âge », Pour une mythologie du Moyen Âge, éd. Laurence Harf-Lancner et Dominique Boutet, Paris, École normale supérieure de jeunes filles (Collection de l'École normale supérieure de jeunes filles, 41), 1988, p. 137-154.
                                                  • Bouchet, Florence, « Froissart et la matière de Bretagne: une écriture "déceptive" », Arturus Rex. Acta conventus Lovaniensis 1987, éd. Gilbert Tournoy, Willy Van Hoecke et Werner Verbeke, Louvain, Leuven University Press, t. 2, 1991, p. 367-375.
                                                  • Bouchet, Florence, « Les "signes" de l'amour: stratégies sémiotiques de la déclaration amoureuse dans le Meliador de Froissart », Bien dire et bien aprandre, 15, 1997, p. 167-178.
                                                  • Bouchet, Florence, « Rhétorique de l'héraldique dans le roman arthurien tardif. Le Meliador de Froissart et le Livre du Cuer d'Amours espris de René d'Anjou », Romania, 116, 1998, p. 239-255.
                                                  • Bragantini-Maillard, Nathalie, « Pour un changement de perspective sur la construction de Melyador de Jean Froissart », Romania, 126:1-2, 2008, p. 145-173.
                                                  • Delogu, Daisy, « Armes, amours, écriture. Figures de l'écrivain dans le Méliador de Jean Froissart », Médiévales, 41, 2001, p. 133-148.
                                                  • Dembowski, Peter F., « Meliador de Jean Froissart, son importance littéraire: le vrai dans la fiction », Études françaises, 32:1, 1996, p. 7-19.
                                                  • Dembowski, Peter F., « Considérations sur Meliador», Études de philologie romane et d'histoire littéraire offertes à Jules Horrent, éd. Jean-Marie d'Heur et Nicoletta Cherubini, Liège, 1980, p. 123-131.
                                                  • Dembowski, Peter F., Jean Froissart and hisMeliador. Context, Craft, and Sense, Lexington, French Forum Publishers, 1983, 197 p.
                                                  • Deschaux, Robert, « Le monde arthurien dans le Meliador de Froissart », Marche romane, 30, 1980, p. 63-67.
                                                  • Diverres, Armel Hugh, « Froissart's Meliador and Edward III's Policy towards Scotland », Mélanges offerts à Rita Lejeune, Gembloux, Duculot, t. 2, 1969, p. 1399-1409.
                                                  • Diverres, Armel Hugh, « Les aventures galloises dans Meliador de Froissart », Marche romane, 30, 1980, p. 73-79.
                                                  • Diverres, Armel Hugh, « The geography of Britain in Froissart's Meliador », Medieval Miscellany Presented to Eugene Vinaver, Manchester, Manchester University Press, 1965, p. 97-112.
                                                  • Diverres, Armel Hugh, « The Irish adventures in Froissart's Meliador », Mélanges de langue et de littérature du Moyen Âge et de la Renaissance offerts à Jean Frappier, Genève, Droz, t. 1, 1970, p. 235-251.
                                                  • Diverres, Armel Hugh, « The two versions of Froissart's Meliador », Studies in Medieval French Language and Literature presented to Brian Woledge in honour of his 80th Birthday, éd. Sally Burch North, Genève, Droz, 1988, p. 37-48.
                                                  • Harf-Lancner, Laurence, « La chasse au blanc cerf dans le Méliador: Froissart et le mythe d'Actéon », Marche romane, 30, 1980, p. 143-152.
                                                  • Huot, Sylvia, « Unruly bodies, unspeakable acts: Pierre de Béarn, Camel de Camois, and Actaeon in the writings of Jean Froissart », Exemplaria, 14, 2002, p. 79-98.
                                                  • Jordan, Leo, « Wallonismen und Franzismen im Méliador », Zeitschrift für romanische Philologie, 52, 1932, p. 732-757.
                                                  • Kibler, William W., « Sagremor dans le Méliador de Froissart », « Si a parlé par moult ruiste vertu ». Mélanges de littérature médiévale offerts à Jean Subrenat, éd. Jean Dufournet, Paris, Champion, 2000, p. 307-311.
                                                  • Kittredge, G. L., « Chaucer and Froissart (with a discussion of the date of the Meliador) », Englische Studien, 26, 1899, p. 321-336.
                                                  • Lods, Jeanne, « Amour de regard et amour de renommée dans le Méliador de Froissart», Bulletin bibliographique de la Société internationale arthurienne, 32, 1980, p. 231-249.
                                                  • Lods, Jeanne, « Les poésies de Wenceslas et le Méliador de Froissart », Mélanges de langue et littérature françaises du Moyen Âge et de la Renaissance offerts à Monsieur Charles Foulon, Rennes, Institut de Français, Université de Haute-Bretagne, t. 1, 1980, p. 205-216.
                                                  • Longnon, Auguste, « Réponse aux objections de M. Kittredge relativement à la date de Meliador », Meliador, éd. A. Longnon, Paris, SATF, 1899 [réimpr.: New York & London, Johnson, 1965], t. 3, p. 363-369.
                                                  • Malfait-Dohet, Monique, « “Biel et grant esploit d'armes” (v. 12770) dans le Meliador de Froissart », Le Monde des héros dans la culture médiévale, éd. Danielle Buschinger et Wolfgang Spiewok, Greifswald, Reineke, 1994, p. 171-180.
                                                  • Menegaldo, Silvère, « Amateurs et professionnels: la composition poétique selon le Meliador et les dits de Jean Froissart », Actes du colloque international "Jean Froissart", Lille 3 - Valenciennes), Perspectives médiévales, 2006, p. 179-201.
                                                  • Schmolke-Hasselmann, Beate, « Ausklang der altfranzösischen Artusepik: Escanor und Meliador », Spätmittelalterliche Artusliteratur. Ein Symposion der neusprachlichen Philologien auf der Generalversammlung der Görres-Gesellschaft Bonn, 25.-29. September 1982, éd. Karl Heinz Göller, Paderborn-München-Wien-Zürich, Ferdinand Schöningh, 1984, p. 41-52.
                                                  • Schwarze, Michael, « L'anthropologie médiévale en transition. À propos du Méliador de Froissart », Froissart dans sa forge, Actes du colloque réuni à Paris du 4 au 6 novembre 2004, éd. Odile Bombarde, Paris, Académie des inscriptions et belles-lettres – Collège de France, Diffusion De Boccard, 2006, p. 147-171.
                                                  • Schwarze, Michael, « Vom Artushof nach Arkadien: das merveilleux in Jean Froissarts Meliador », Das Wunderbare in der arthurischen Literatur. Probleme und Perspektiven, éd. Friedrich Wolfzettel, Tübingen, Niemeyer, 2003, p. 113-125.
                                                  • Taylor, Jane H. M., « The lyric insertion: towards a functional model », Courtly Literature: Culture and Context. Actes du 5e congrès triennal de l'International Courtly Literature Society, Dalfsen (Pays-Bas), 9-16 août 1986, éd. Keith Busby et Erik Kooper, Amsterdam et Philadelphia, Benjamins, 1990, p. 539-548.
                                                  • Van Coolput, Colette-Anne, « Autoportraits de héros », Conjunctures: Medieval Studies in Honor of Douglas Kelly, éd. Keith Busby et Norris J. Lacy, Amsterdam & Atlanta, Rodopi, 1994, p. 97-111.
                                                  • Van Coolput, Colette-Anne, et Paul Vandenbroeck, « Art et littérature: sur la description de quelques toiles peintes dans deux textes hennuyers du XIVe siècle », Revue du Nord, 73, 1991, p. 5-31.
                                                  • Wolfzettel, Friedrich, « La "modernité" du Meliador de Froissart: plaidoyer pour une revalorisation historique du dernier roman arthurien en vers », Arturus Rex. Acta conventus Lovaniensis 1987, éd. Gilbert Tournoy, Willy Van Hoecke et Werner Verbeke, Louvain, Leuven University Press, t. 2, 1991, p. 376-387.
                                                  • Zink, Michel, « Froissart et la nuit du chasseur », Poétique, 11, 1980, p. 60-77.
                                                  • Zink, Michel, « Les toiles d'Agamanor et les fresques de Lancelot », Littérature, 38, 1980, p. 43-61.
                                                  • Zink, Michel, Froissart et le temps, Paris, Presses Universitaires de France, 1998, 223 p.
                                                  • Zink, Michel, « Meliador and the inception of a new poetic sensibility », Froissart Across the Genres, éd. D. Maddox et S. Sturm-Maddox, Gainesville, University Press of Florida, 1998, p. 155-175.
                                                • Ballades

                                                  Date:  
                                                  Forme:  
                                                  Langue: Français
                                                  Contenu:  
                                                  Incipit:  
                                                  Explicit:  
                                                  Manuscrits
                                                  1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                                  2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                                                  Éditions modernes
                                                  • Jean Froissart, Ballades et rondeaux. Édition avec introduction, notes et glossaire par Rae S. Baudouin, Genève, Droz (Textes littéraires français, 252), 1978, 178 p.
                                                    CR: Jacques Lemaire, dans Scriptorium, 35:1, 1981, p. 167-168. *
                                                  Traductions modernes
                                                  • en français:
                                                    Études
                                                    • Rondeaux

                                                      Date:  
                                                      Forme:  
                                                      Langue: Français
                                                      Contenu:  
                                                      Incipit:  
                                                      Explicit:  
                                                      Manuscrits
                                                      1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                                      2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                                                      Éditions modernes
                                                      • Jean Froissart, Ballades et rondeaux. Édition avec introduction, notes et glossaire par Rae S. Baudouin, Genève, Droz (Textes littéraires français, 252), 1978, 178 p.
                                                        CR: Jacques Lemaire, dans Scriptorium, 35:1, 1981, p. 167-168. *
                                                      Traductions modernes
                                                      • en français:
                                                        Études
                                                        • Chants royaux

                                                          Date:  
                                                          Forme:  
                                                          Langue: Français
                                                          Contenu:  
                                                          Incipit:  
                                                          Explicit:  
                                                          Manuscrits
                                                          1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                                          2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                                                          Éditions modernes
                                                          • The Lyric Poems of J. Froissart, éd. R. R. McGregor, Chapel Hill, University of North Carolina Press (North Carolina Studies in the Romance Languages and Literatures, 142), 1975.
                                                          Traductions modernes
                                                          • en français:
                                                            Études
                                                            • Pastourelles

                                                              Date:  
                                                              Forme:  
                                                              Langue: Français
                                                              Contenu:  
                                                              Incipit:  
                                                              Explicit:  
                                                              Manuscrits
                                                              1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                                              2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                                                              Éditions modernes
                                                              • The Lyric Poems of J. Froissart, éd. R. R. McGregor, Chapel Hill, University of North Carolina Press (North Carolina Studies in the Romance Languages and Literatures, 142), 1975.
                                                              Traductions modernes
                                                              • en français:
                                                                Études
                                                                • Serventois

                                                                  Date:  
                                                                  Forme:  
                                                                  Langue: Français
                                                                  Contenu:  
                                                                  Incipit:  
                                                                  Explicit:  
                                                                  Manuscrits
                                                                  1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                                                  2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                                                                  Éditions modernes
                                                                  • The Lyric Poems of J. Froissart, éd. R. R. McGregor, Chapel Hill, University of North Carolina Press (North Carolina Studies in the Romance Languages and Literatures, 142), 1975.
                                                                  Traductions modernes
                                                                  • en français:
                                                                    Études
                                                                    • Virelais

                                                                      Date:  
                                                                      Forme:  
                                                                      Langue: Français
                                                                      Contenu:  
                                                                      Incipit:  
                                                                      Explicit:  
                                                                      Manuscrits
                                                                      1. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 830 (B)
                                                                      2. Paris, Bibliothèque nationale de France, français, 831 (A)
                                                                      Éditions modernes
                                                                      • The Lyric Poems of J. Froissart, éd. R. R. McGregor, Chapel Hill, University of North Carolina Press (North Carolina Studies in the Romance Languages and Literatures, 142), 1975.
                                                                      Traductions modernes
                                                                      • en français:
                                                                        Études

                                                                        Rédaction: Nathalie Bragantini
                                                                        Compléments: Laurent Brun
                                                                        Dernière mise à jour: 18 octobre 2008


                                                                        votre commentaire