• Titre : Les Bienveillantes

    Auteur : Jonathan Littel

    Editeur : Gallimard 2006

    ISBN : 2-07-078097-X

    905 pages

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    Le roman, outre sa finalité première, qui relève de la poétique, a de multiples fonctions : sociale, historique, psychologique (catharsis), initiatrice…, qui ont toutes fait l’objet d’innombrables études.

    Celui de Jonathan Littel  en a une supplémentaire, celle qui consiste à réunir toutes les autres.

    C’est le roman total, comme il en existe quelques-uns.

    Le personnage et narrateur, Aue, a tout pour déplaire au lecteur.

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    Né de mère française et de père allemand, il quitte la France pour s’engager dans la SS, où il sait que son homosexualité risque de lui coûter la vie. Il est maladivement amoureux de sa sœur jumelle, avec qui il a commis, et voudrait commettre encore et toujours, l’inceste. Il gravit les échelons, avant et pendant la guerre, en s’occupant d’administrer les opérations de nettoyage ethnique des pays envahis. Il s’efforce de parvenir à l’efficacité optimale dans la gestion de l’extermination, et n’en supporte pas la réalité concrète. Tout en cherchant à se faire bien noter, il a le sentiment de sa médiocrité, et ne doit son avancement qu’aux interventions de son ami Thomas, qu’il finit par tuer, après avoir assassiné, au cours d’un voyage en France occupée, sa propre mère et son beau-père. Persuadé du bien-fondé de la mise en œuvre de la solution finale et du programme de purification raciale, il regrette que l’extermination ne se fasse pas plus « proprement », et que la force de travail des millions de déportés ne soit pas exploitée efficacement pour l’édification du Reich et sa victoire contre l’ennemi. Il calcule en bon gestionnaire ce que doivent être la ration maximale de nourriture et les conditions minimales d’hygiène pour que l’esclave reste rentable.

    Entre ses vomissements et ses diarrhées schizophréniques, il organise méthodiquement l’holocauste.

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    En tout cela, il est odieux, mais il n’est pas inhumain.

    Voilà ce qui crée le malaise chez le lecteur que l’auteur amène, insidieusement, par petites touches, à se demander si entre Aue et lui, nulle affinité n’est possible, d’autant plus crucialement que le "héros" s’exprime à la 1 ère personne, ce qui empêche la distanciation.

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    Aue dégoûte, certes.

    Mais il n’est pas invraisemblable : il est, par la force du roman, un homme qui peut avoir existé, qui a existé, qui existe, il faut avoir la lucidité et l’honnêteté de le reconnaître, non seulement au-dehors, mais aussi, tragiquement, au-dedans de chacun d’entre nous.

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    Aue dégoûte, certes, mais il nous nous force à nous voir tels que nous sommes. <o:p></o:p>

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    Un romancier atteint au génie lorsque le lecteur sait que le roman n’est pas qu’un roman…

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    Pour moi, ce roman n’est pas que littérature.

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    Patryck Froissart, St Gilles les Bains, le 28 juillet 2008<o:p></o:p>


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  • Titre : Le Château de Cène

    Auteur : Bernard Noël

    Editeur : Gallimard, 1990

    ISBN : 2-07-078032-5

    180 pages

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    Véritable exercice de style pornographique, ce livre expressément provocateur est une suite de scènes de copulation, de cènes de foutre, d’obscènes séances d’un sadomasochisme exacerbé, orchestrées par la mystérieuse Mona, Femme et Déesse.

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    Sur les cascades de stupre flottent des morceaux de poésie souvent réussis.

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    Mona est le centre, l’origine et la fin du monde.

    Mona est à la fois l’imagination maîtresse qui débride, bride et emporte le poète dans une chevauchée fantastique au travers de l’anormalité, et l’aimée, l’idéale que rêve d’atteindre puis de conquérir le narrateur.

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    Mona est tout ensemble la poésie et celle qui l’inspire.

    Elle est dans le poète, et aussi autour et hors du poète.

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    Mona est l’espoir du poète, le vase sacré à quoi il veut boire à la lie.

    Mona est le désespoir du poète, le poème absolu qui se dérobe, qui échappe sans cesse à son créateur, qui ne désire pourtant qu’une chose : devenir la créature de sa créature.

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    Cette longue ode au sexe peut aujourd’hui paraître un peu jaunie par les années.

    Certains passages en sont d’une outrance quelque peu démodée.

    Ce qui se voulut choquant, souvent, ne l’est plus.

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    Mais Le Château de Cène reste un beau délire.

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    Patryck Froissart, St Gilles les Bains, le 22 juillet 2008

     


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